Un très bel article, déjà signalé par Anti, est à la une du blog Tassaft mon village, auquel nous avions consacré un coup de coeur en novembre dernier. Le voici.
« Vous avez chanté ma beauté. Vous avez oublié mes droits ! »
Des artistes, des écrivains ont vanté la femme kabyle, sa beauté naturelle et son dévouement sans fin aux valeurs de sa société et des siens. La femme de son côté en est presque comblée sauf qu’elle aurait aimé qu’on réhabilite d’abord son statut de personne à part entière avec ses droits et ses devoirs.
Ben Mohammed, notre grand poète, auteur de « Vava Inouva », s’est mis dans la peau de la femme pour dire la femme :
«Technam ghef zzin iw » (vous avez chanté ma beauté, mon honneur mais vous avez oublié de défendre mes droits).
Et c’est la superbe voix de Nouara qui chante le cri de Ben.
Ecoutez la chanson de Nouara :
Ce cri est également le cri du message de l’album de Nouara. Cet album sorti en 1975 est intitulé : « Nouara 75». « La femme kabyle et ses problèmes» fait partie de ces chef-d’oeuvres de la chanson algérienne d’expression kabyle, amazighe. Toutes les chansons de l’album sont consacrées au monde intérieur de la femme : ses rêves, ses amours, ses craintes mais également ses combats. Cet album combat n’a pas omis de mettre le doigt là où ça fait mal, là où ça dérange. S’adressant à la société en général et à la gent masculine en particulier, Nouara, dans sa chanson « Technam gheh zzin iw » n’a pas été par quatre chemins pour dire certaines vérités aux mentalités rétrogrades. Tout en étant reconnaissante envers ceux qui ont chanté sa beauté et ses valeurs, Nouara aurait souhaité qu’ils mettent l’accent plus sur ses droits, son statut brimé.
« Technam ghef zzin iw » est composée de trois couplets qui suivent en quelque sorte le rythme de la vie. Juste après ce refrain :
« Vous avez chanté ma beauté et mes valeurs mais vous avez oublié mes droits. Maintenant que j’ai pris conscience de mon drame, nous allons nous expliquer vous et moi une fois pour toutes».
D’abord, la naissance de la fille est rarement bien accueillie en Kabylie. La voix de Nouara incarnant le personnage d’un bébé fille et affrontant sa société :
« Tout bébé que j’étais, je vous entendais exprimer votre désolation à ma mère. Autrement dit, vous aurez aimé que je sois née garçon».
Terrible réalité que de se sentir rejetée dès le départ, dés sa naissance. Ce qui crée des écarts, des mondes et des malentendus qui fracturent la société kabyle, algérienne.
Ensuite vient le mariage :
«Une fois mariée, je croyais pouvoir enfin savourer les délices de la vie – en vain ! »
La réalité misogyne et amère rattrape encore la femme. En dehors du ménage, souligne et signe la chanson, la femme-épouse ne dispose d’aucun droit, d’aucune part.
Vient enfin le stade de la maturité et de l’action : le dernier couplet de Nouara pose une multitude de questions :
« Ces injustices dureront-elles encore longtemps ? Quand est-ce que je renaîtrai et quand mon soleil se lèvera-t-il enfin? »
En attendant, rêvons ensemble des lendemains meilleurs et pour la femme et pour l’homme de Kabylie, d’Algérie et du monde.
Djamila Addar, Montréal, Canada
Source: http://tirrugza.tripod.com/id11.html
Illustration : blog Tassaft
Le blog « Tassaft mon village » est ici : http://tassaft.blogs-de-voyage.fr/
A lire aussi sur le blog : « Je suis une guerre »
Un texte magnifique que je suis heureuse de lire ici aussi.
anti
Je corresponds avec une Algérienne depuis plus d’un an. Elle était professeur d’Arts et lettres, a fait une grave dépression après son mariage (arrangé) avec un enseignant, qui s’est révélé intégriste et schizophrène. Il a perdu la raison et elle élève seule ses trois enfants, avec une maigre pension octroyée après son licenciement. Elle m’a raconté sa vie, dans l’Algérie d’aujourd’hui. On ne peut imaginer le calvaire imposé aux femmes dans ce pays. Et celles qui osent s’exprimer risquent leur vie.
En écho avec la note d’aujourd’hui sur « Umoja, un village pour se protéger des hommes »
http://www.annagaloreleblog.com/archive/2009/03/09/umoja-un-village-pour-se-proteger-des-hommes.html
Merci encore Anna pour ce coup de coeur que je viens de decouvrir seulement aujourd’hui!
Par cet article de Djamila ADDAR, j’ai voulu rendre un hommage à la femme algerienne qui reste encore soumise à un code de la famille infamant malgré quelques acquis ces dernières années!
Bien à vous!
C’est un plaisir de vous lire et de rendre encore plus visible ce que vous mettez en ligne sur votre blog. Cet article est extrêmement fort et plus il sera lu, mieux cela vaudra.
Merci à vous.
face à une misogynie culturelle et ancestrale, que meme la femme kabyle a faite sienne, que faire, sinon se battre cote à cote, chacune et chacun selon ses moyens… mon arme à moi c’est la caricature … à commenter sur le blog :… … http://www.lafa-marab.over-blog.com
amitiés …
Merci à toi pour ton passage ici.
C’est très… fort !
Je suis émue par la reprise de « Tu seras un homme mon fils » de Kipling. Terrible.
tu seras une Femme … pour mon fils.
SI TU PEUX VOIR DÉTRUIS … TES RÊVES ET TA VIE
ET SANS DIRE UN MOT, ACCEPTER DE BÂTIR
UN FOYER, MÊME SI TU N’EN A PAS ENVIE
SANS UN GESTE D’HUMEUR, SANS UN SOUPIR
SI TU PEUX ÊTRE MARIÉE SANS ÊTRE FOLLE D’AMOUR
SI TU PEUX ÊTRE FORTE, SANS CESSER D’ÊTRE TENDRE
ET TE SENTANT HAIE … SANS HAIR À TON TOUR
POURTANT AIMER TON MARI ET TOUJOURS LE DÉFENDRE
SI TU PEUX SUPPORTER LES MAUVAISES PAROLES
COLPORTÉES PAR TA BELLE MÈRE ET TES BELLES SŒURS
LES ENTENDRE MENTIR … DIRE QUE TU ES FOLLE
SANS DEVENIR AIGRIE AU FOND DE TON CŒUR
SI TU SAIS TE LEVER AUX AURORES ET DORMIR LA DERNIÉRE
SATISFAIRE À TOUS LES DÉSIRS DE TON MAITRE
MANGER APRÈS LUI, … SES SŒURS ET SES FRÉRES
RESTER DIGNE ET NE RIEN LAISSER PARAITRE
SI TU SAIS FAIRE LE COUSCOUS, SAUCE PIQUANTE
TOUT EN FAISANT DES GOSSES… SURTOUT DES GARÇONS
SI EN PLUS TU TE VOILES ET QUE TU ES PRATIQUANTE,
TOUT LE MONDE APPRÉCIERA ET RETIENDRA LA LEÇON
ALORS LES VIEUX, LES VIEILLES… ET TOUT LE VILLAGE
LOUERONT À JAMAIS TON ESPRIT DE SACRIFICE
AVEC LA BÉNÉDICTION DE L’IMAM ET LE CONSEIL DES SAGES…
TU SERAS UNE FEMME … … POUR MON FILS.
Ce texte, littéralement,
J’ai testé pour vous.
et …
suis contente d’en être sortie .
Mais çà s’est passé en France.
Hélas, en France, çà commence à devanir corant. (je laisse la faute de frappe.. elle est frappante.. désolée)
tu devrais gentiment preciser que ce poeme de kipling arabo-feminise est tirè de mon blog
lafa-marab ,,, pour le reste j adore
amitié si tu veux
Bonjour Nasser,
Je pense que tout le monde l’avait compris : ce poème a été cité par Anti en réponse à ton commentaire où tu nous signalais ton blog, ses mots d’introduction montrent clairement que c’est là qu’elle l’a trouvé et l’émotion qu’elle exprime ne peut que donner envie d’y aller pour en lire plus.
Bien amicalement