Photo Eric Cantona
L’actualité nous parle d’identité française, d’étrangers en situation irrégulière, d’expulsions, de l’autre dont il faut se méfier, c’est l’occasion de revenir sur un ouvrage complètement dans l’air de ce temps, dont on n’avait pas parlé à l’époque. En effet, le 3 décembre dernier, Eric Cantona sortait un livre de photographies sur et pour la Fondation Abbé Pierre : Elle, Lui, Les autres.
Cantona, vraiment, il ne finit pas de m’épater cet homme. Sportif, acteur, photographe, grande gueule et gueule d’amour…
A la sortie du livre, Ludovic de Foucaud avait publié un excellent article sur le site de Bibliobs, article dont voici quelques extraits :
« Être français, c’est être…
Réponse en fin de note 😉 »Par Ludovic de Foucaud
Contre la misère, l’injustice et le débat sur l’identité nationale, l’ex-footballeur a montré ce matin qu’il a gardé son âme de combattant et son sens de la formule. Rencontre, à l’occasion de la sortie de son beau livre de photographies consacré aux mal-logés
On connaît Eric the King, footballeur hors pair, joueur complet et charismatique, dont l’attitude combattive sur et en-dehors du terrain a fortement contribué à construire la légende. Les chansons qui lui sont dédiées résonnent encore aujourd’hui dans les travées des stades anglais, plus de dix ans après qu’il ait mis un terme à sa carrière professionnelle. On connaît aussi Cantona comédien, depuis « le Bonheur est dans le pré » en 1995 jusqu’au « Looking for Eric » de Ken Loach, cette année. On connaît maintenant Cantona photographe. Il présentait ce matin un livre plutôt réussi, « Elle, lui et les autres », publié par les Editions Desclée de Brouwer en partenariat avec la Fondation Abbé Pierre et disponible en librairie depuis le 3 décembre. L’occasion pour nous de constater que loin des terrains, King Eric a toujours envie d’en découdre.
Il est 9h40 quand Eric Cantona pénètre dans la salle où se déroule le petit déjeuner de presse ; la porte s’ouvre sur sa silhouette massive. Les cheveux courts un peu en bataille et la barbe grisonnante, il laisse échapper « Oula ! » en découvrant la douzaine de journalistes qui l’attend.
Pendant plusieurs mois, accompagné de membres de la fondation, Eric Cantona a parcouru la France des mal-logés. En région parisienne, à Metz, à Lyon, à la Réunion et même au Brésil où la fondation Abbé Pierre est aussi active, Cantona a été le témoin de « situations inacceptables » qu’il a tentées de saisir et que ce livre raconte en images. Avant qu’il n’arrive, le directeur éditorial de DDB Marc Bouchez et le délégué général de la fondation Patrick Doutreligne confiaient à quel point l’ancien footballeur s’était impliqué dans le projet ; il a lui-même financé les déplacements nécessaires à son reportage et s’est beaucoup intéressé au travail de mise en page du livre.
C’est qu’en photographie, le Français préféré des Anglais n’en est à son coup d’essai :
« Le noir et blanc, c’est mon choix. En photographie, j’ai des thèmes. J’ai commencé par l’abstrait, puis j’ai fait un travail sur la corrida. Pour ce livre, le noir et blanc s’imposait. »
« Je voulais pas tomber dans le misérabilisme. Je sais que ces gens sont beaux. Je la vois c’te beauté dans leurs yeux. Ces photos, c’est exactement ce que j’ai voulu faire. »
« Je dois voir dans la photo le sentiment que j’ai quand je la prends, pour continuellement être dans l’émotion, garder les yeux ouverts sur le monde, et puis plus égoïstement, me sentir en vie. »
Habitants et baraques, quartier du brûlé, prochainement réhabilité par la fondation Abbé Pierre, Saint Denis, La Réunion – Eric Cantona
Mais on comprend vite que Canto ne compte pas s’étendre sur son travail à proprement parler, ni même sur les rencontres qu’il a pu faire pendant son reportage.
« J’ai beaucoup de mal à parler d’un cas en particulier. Toutes les histoires sont différentes. Toutes les histoires sont marquantes. »
« Les gens étaient avertis que je venais. Je voulais pas leur faire perdre trop de temps. Je suis pas du genre à vouloir déranger. »
Mais quand il évoque les raisons qui l’ont poussé à accepter la proposition de Patrick Doutreligne, son regard se fait plus dur, ses gestes plus tranchants :
« On est là pour rappeler que tout ça n’est pas naturel. On est dans un pays riche, c’est inacceptable. »
Et pourtant, dit-il, cette situation n’est pas inconnue : « Ça nous crève les yeux à tous (…) C’est ce qui m’inquiète le plus ; on voit déjà, et on s’habitue ». En fait, c’est comme si « les gens regardent, mais ne voient plus. Voilà. »
« On trouve des excuses à tout, à tout le monde, à ce que les gens crèvent dans la rue. On s’habitue à zapper, à s’abrutir, à supporter la manipulation, le bourrage de crâne. Faut se battre contre cette facilité-là. »
Parrain de la fondation depuis quatre ans, Canto ne croit pas à l’urgence d’une cause plus qu’une autre, « tout me touche, il faut toujours combattre ». Il le pensait déjà quand il était footballeur professionnel : « On est pas en quarantaine quand on est footballeur. Si on en a envie, on peut garder les yeux ouverts sur le monde. » De toute façon, rappelle-t-il, « rares sont les joueurs issus de milieux aisés. »
Dans la préface du livre, il décrit d’ailleurs l’exode de ses grands parents, réfugiés espagnols à Argelès-sur-mer : « Ils étaient victimes du plus total dénuement. Ces périodes difficiles marquent durablement une famille. La nôtre n’a pas oublié. »
C’est pourquoi, « quelque soit la réussite », Canto ne s’est jamais « cru au dessus des autres ».
(…)
L’occasion est alors trop belle pour ne pas évoquer la question de l’identité nationale… Vous pouvez lire la suite de l’article sur Bibliobs et aussi, vous faire plaisir en écouter Cantona himself répondre à la question en vidéo :
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Canto, c’est l’humanité, la belle, celle qu’on aime… Très belles photos, poignantes, fortes et en même temps, emplies de force vitale. On sent derrière chacune tout un monde de contrastes, la galère et l’espoir, l’abattement et la fierté, la tristesse et la joie.
Du très beau boulot, un vrai témoignage, chapeau.
Jolie façon d’avancer dans la vie que celle de Cantona. Sous le côté bourru se cache une vraie sensibilité et le bonhomme n’a pas finin de nous réjouir. Beau témoignage en photos noir blanc. Merci Môssieu Cantona!