Justice et fête

Vous devez ce magnifique titre de note à Anti. Elle avait envie d’aller voir Justice sur scène. Hier soir, ils étaient aux Arènes et nous aussi, grâce à un proche qui nous a obtenu deux invitations. En fait, Anti avait pensé à « Justice est fête » mais j’ai préféré une fois de retour à la maison remplacer le « est » par « et », parce que Justice, franchement, c’était tellement ennuyeux qu’on est parti bien avant la fin et que la fête, on l’a trouvée après, dans la rue.

so me justice.jpgAvant ce concert, moi, Justice, je n’en connaissais que très peu de chose. Ce duo français de musique électronique s’est fait connaître par ses remix de morceaux et d’artistes très connus.

Il y en a au moins un que vous avez forcément entendu : celui de Superstition de Stevie Wonder, qui a été utilisé comme générique par Le Grand Journal de Michel Denisot sur Canal+ pendant trois saisons consécutives (de fin 2007 à mi 2010).

Un autre titre d’eux vraiment sympa, c’est D.A.N.C.E., leur premier gros tube, dont le clip est époustouflant d’imagination grâce aux dessins du graphiste So Me.

Puis est venue la controverse autour de leur clip sur le morceau Stress. On y voit des petits casseurs de banlieue, portant sur leur blouson la croix qui sert de symbole à Justice, faire toutes sortes de dégâts gratuits sur leur passage. Problème : ils sont tous noirs ou arabes, on croirait que c’est Zemmour qui a écrit le script. Polémique sur internet, plainte du MRAP, sac de nœud pas très clair qui mène au retrait de cette plainte parce que le scénariste affirme au président du MRAP que le FN aussi veut porter plainte alors que c’est faux, justification vaseuse des musiciens, bref pas très glorieux tout ça.

Bon, un duo de musiciens dont l’instrument principal s’appelle Valentine ne pouvait pas être foncièrement mauvais. Oui, oui, Valentine, c’est le nom de leur synthétiseur fait exprès pour eux, auquel ils ajoutent tout un tas d’autres bidules et machins électroniques avec plein de voyants lumineux qui clignotent.

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Le seul problème, c’est que sur scène, ce qu’ils font n’a aucun intérêt. On peut aimer leurs morceaux mais voir la vague silhouette de deux mecs qui s’affairent sur une table de mixage pour les reproduire en live, franchement c’est aussi palpitant que voir les feuilles d’un livre sortir d’une imprimante. Ce n’est pas parce que le livre est bien que le spectacle de sa fabrication est fascinant.

Circonstance aggravante, auparavant, on a dû se farcir une première partie interminable, un autre duo qui en plus de n’avoir aucun attrait scénique ne produisait aucune matière sonore intéressante. Nous avons eu soudain une révélation mystique : nous n’étions pas en train d’assister à un concert, nous étions dans une immense boîte de nuit. Tous ces gens étaient venus là non pas pour écouter des artistes mais pour se montrer (remarquable diversité de t-shirts et incroyable quantité de lunettes de soleil en pleine nuit). Mais qu’est-ce que nous foutions là ?

J’ai commencé à faire une partie de mur de briques sur mon Blackberry pendant qu’Anti faisait une réussite sur le sien. On a plus ou moins somnolé alors que le niveau sonore dépassait les 100 décibels (il y avait un affichage juste en face de nous). Et quand Justice est arrivé, la musique était enfin là mais le spectacle, toujours pas. En plus, avec leur grande croix lumineuse, on se serait cru à un rituel déchaîné à la gloire d’une secte intégriste.

Au deuxième morceau, on a fui.

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En remontant les boulevards, on a entendu un petit groupe de rue qui chantait et jouait hyper bien devant un bar. On s’est arrêté pour les écouter interpréter comme des dieux Black and white de Michael Jackson et Unchain my heart de Joe Cocker.

Avec eux, pas de montagne d’électronique et pas de frime pour faire de la musique. Juste une guitare sèche, une contrebasse et un cajon. Et leurs voix. Il y avait chez ces trois-là mille fois plus de talent et de sensibilité que dans tout le déluge sonore que nous avions entendu aux Arènes. Le patron du bar m’a dit qu’ils s’appellent Version Acoustique. Ils jouent là tous les jeudis. On ira les revoir jeudi prochain.

Le jeudi en été à Nîmes, les rues du centre sont animées jusqu’à très tard par des stands de commerçants et des groupes de musiciens. La vraie fête, elle était là.

Très belle journée à vous

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Première photo extraite du clip DANCE, les autres de moi

3 Replies to “Justice et fête”

  1. valentine Post author

    Je suis explosée de rire à la lecture de ton compte rendu de votre soirée d’hier.

    « …Oui, oui, Valentine, c’est le nom de leur synthétiseur fait exprès pour eux, auquel ils ajoutent tout un tas d’autres bidules et machins électroniques avec plein de voyants lumineux qui clignotent. »

    Je vois très bien le style. Nous avons assisté à un concert semblable l’an dernier au festival de la Cité à Lausanne. Un des mecs arrive avec son mac dont il tente de scotcher la pomme ??????!!!!! Là, tu sens déjà le lézard poindre. Et le groupe……maman au secours. Entre allumés et illuminés.

    Beaucoup de bruit pour rien mais au final, qu’est-ce qu’on se marre 🙂

  2. Anna Galore Post author

    Ben voilà, c’est ce qu’on a fini par se dire : d’accord, on s’ennuie mais prenons ça pour une expérience sociologique d’immersion.

    En fait, tout est tellement superficiel chez eux qu’ils essaient de combler le vide avec des méga-synthétiseurs qui clignotent et des symboles de carton-pâte dont ils n’ont aucune idée de ce qu’ils pourraient en dire de profond.

    Un exemple ? Voici un commentaire bouleversifiant de Gaspard, l’un des deux acolytes du groupe, sur le fait qu’ils ont utilisé un son hyper compressé sur leur album, une question de fond, en effet (qui me rappelle un sketch des Inconnus) : « C’est un choix : la compression abusive écrase tout et fait perdre de l’espace, mais on pense que la musique que nous faisons n’a pas besoin d’espace. Par contre la compression révèle des choses que tu n’entends pas quand ça n’est pas compressé, et ça redonne vie à des choses qui peuvent être froides avant compression. Ici, on privilégie le style à la performance technique ».

    Voilà, voilà, je me disais aussi…

  3. anti Post author

    « J’ai commencé à faire une partie de mur de briques sur mon Blackberry pendant qu’Anti faisait une réussite sur le sien. »

    Là, ça sentait quand même le jus de boudin 😉 Mdrrr aussi à te lire Anna. Conclusion, symp à écouter à fond dans la voiture de temps en temps, mais inintéressant sur scène.

    « Beaucoup de bruit pour rien mais au final, qu’est-ce qu’on se marre 🙂 »

    Carrément, une passionnante expérience de sociologie avec mention spéciales pour certains T-shirts très sympas.

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