Aux USA, les relevés météo précis existent depuis 1895. Le Centre National des Données Climatiques a récemment publié une carte montrant que les douze derniers mois qui viennent de s’écouler ont été, pour une bonne partie du territoire, les plus chauds jamais connus depuis les 117 ans que ces relevés sont établis.
Rien que dans la seconde moitié du mois de juin, 170 nouveaux records absolus ont été battus dans 48 états. Comme souvent lors de phénomènes extrêmes de ce genre, alors qu’une partie du pays a de plus en plus chaud, l’autre se refroidit tout aussi brutalement, ce qui conduit à des sècheresses et des incendies gigantesques d’un côté et de l’autre, des orages violents et des inondations.
Ce sont ces évènements en direction opposée qui font que juin 2012 n’est pas le mois de juin le plus chaud lorsqu’on fait la moyenne des températures sur l’ensemble du territoire (le record reste aux années 2005 et 2010), même si globalement il reste très au-dessus de ce qu’il a pu être tout au long du siècle précédent.
Dans le New Jersey, par exemple, cela fait 17 mois de suite que les températures sont au-dessus de la normale.
Un rapport publié en mars par le GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) souligne que « le dérèglement climatique a conduit depuis un demi-siècle à des modifications dans les extrêmes climatiques, telles que des vagues de chaleur, des records de températures élevées et, dans de nombreuses régions, des précipitations abondantes. »
L’analyse ci-dessus n’inclue pas les températures du mois de juillet en cours, qui semblent battre à leur tour tous les records de chaleur pris en compte jusqu’au 30 juin.
Au-delà de cette confirmation inquiétante d’un dérèglement climatique de plus en plus visible aux yeux de tous alors que plus d’un Américain sur deux affirme ne pas y croire, ce qui me frappe, c’est l’ampleur des zones rouge et orange de la carte.
Seule la frange littorale refroidie par l’océan Pacifique à l’ouest et les Rocheuses à l’est a connu ces douze derniers mois une température proche de la normale. Tout le reste du pays est en surchauffe et, comme le phénomène n’a pas de raison de s’arrêter aux frontières, cela signifie que le Canada au nord et le Mexique au sud sont dans une situation analogue.
Les autres régions de notre hémisphère ne sont pas mieux loties. Rien que depuis le début du mois de juillet :
– pluies torrentielles d’une ampleur sans précédent dans la région de Krasnodar (Russie) où les eaux sont montées de 7 mètres en quelques heures,
– inondations record dans le nord-ouest de la Chine à la suite de pluies ininterrompues pendant des semaines,
– au Japon, précipitations saisonnières qualifiées de «sans précédent», les eaux d’une rivière ayant atteint le toit d’un restaurant avant de se retirer,
– vague de tornades en Pologne,
– temps froid et pluvieux sur la majeure partie de l’Europe en raison d’un anticyclone des Açores décalé par rapport à sa position habituelle en cette période de l’année.
Pendant plus de dix millénaires, la banquise polaire a joué le rôle de climatiseur – et de régulateur – planétaire. C’est particulièrement vrai pour l’hémisphère nord qui a beaucoup plus de terres émergées que le sud. Mais lors des trente dernières années, la fonte des glaces s’est accélérée à une vitesse telle que chaque prévision annoncée pour l’année suivante s’est avérée en-dessous de la réalité observée.
Depuis 1980, plus d’un million et demi de kilomètres carrés de banquise a disparu pour laisser place à une mer libre de glace. « C’est la sixième année consécutive que la couverture de glace de l’océan arctique défie ainsi les prévisions des climatologues en se rétractant plus vite et plus fort » écrit Sylvestre Huet dans un article consacré à ce désastre.
Il conclut sur ces mots : « En raison de l’importance du stock de carbone des sols arctique, la transformation de la toundra en forêt boréale (taïga) produit certes un stockage de carbone dans les arbres, mais le réchauffement du sol et sa pénétration par les racines des arbres provoque une décomposition accélérée de la matière organique et une émission de gaz carbonique vers l’atmosphère. Au total, le bilan est en faveur d’un nouvel accroissement de l’effet de serre ».
Le climatiseur déréglé surchauffe et tout le climat mondial part en vrille.
Le pire, c’est que les lobbies du pétrole, ceux-là même qui font de la désinformation permanente visant à faire croire en dépit de tous les relevés que le climat ne connait aucun réchauffement, loin de s’inquiéter de la catastrophe en cours, ne pensent qu’à se frotter les mains en rêvant de nouveaux champs pétroliers à exploiter dans les eaux laissées libres par la disparition de la banquise. Leur cynisme cupide n’a d’égal que leur bêtise criminelle.
Photos : incendies dans le Colorado (catastrophemap.com) et inondations en Krasnodar (Marina Kozhukhovskaya)