Par un après-midi lumineux et chaud, Anti s’installe au piano pendant que le produit qu’elle s’est mis sur les cheveux agit. Elle a rassemblé sa longue chevelure en un équilibre improbable au-dessus de sa tête. Elle porte un peignoir d’homme. Rien de moins apprêté et pourtant, tout en elle n’est que grâce.
Je m’immobilise et contemple sa beauté, comme en hypnose. Le soleil semble venir de partout à la fois, de derrière moi où il se trouve réellement mais aussi des fenêtres qui donnent sur l’occident. Lui aussi ne veut rien manquer de ce moment de plénitude.
Anti joue, comme elle le fait tous les jours depuis que le piano a été déplacé là, dans le séjour. En l’entendant, Paloma rentre furtivement et longe le coffre jaune pour aller s’installer sur le fauteuil noir, son préféré. Elle va rester là aussi longtemps qu’Anti jouera, bercée par la musique, en harmonie avec l’instant.
Les grappes de notes emplissent la pièce et vont se perdre en murmurant dans les chambres alentour. Les plantes bruissent discrètement à leur passage, ou alors peut-être est-ce le vent qui va et vient entre le jardin et la maison.
Le visage d’Anti me fait penser à celui, émouvant, d’une enfant qui s’applique.
Elle respire le bonheur. Moi autant qu’elle.
Très belle journée à vous