La bataille judiciaire a duré près de vingt ans mais pour une fois, ce sont les défenseurs de l’environnement qui ont gagné. Il y a deux jours, la justice équatorienne a confirmé en appel la condamnation de Chevron-Texaco (second plus gros groupe pétrolier américain) à payer une amende record de 18 milliards de dollars en réparation des pollutions répétées que ce groupe a fait subir à la forêt amazonienne depuis son arrivée dans le pays – nappes phréatiques polluées aux métaux lourds et aux hydrocarbures, pétrole déversé à même le sol à ciel ouvert sur plusieurs centaines de kilomètres carrés, cancers et malformations à répétition pour la population locale exposée, etc.
En première instance, Chevron n’avait écopé « que » de 9 milliards mais le juge avait prévu de doubler la peine si la compagnie ne présentait pas d’excuses pour son comportement. Il faut croire que même cela était inacceptable pour les pétropollueurs.
Texaco, filiale de Chevron implantée en Équateur de 1964 à 1990, a bénéficié de concessions sur plus d’un million d’hectares de forêt primaire, un territoire sur lequel vivaient plus de 30 000 indigènes.
La toute première plainte a été déposée par Maria Aguinda, une Indienne quechua de 61 ans, qui vit dans une communauté indienne du nord-est de l’Équateur. Comme elle ne parle pas l’espagnol, c’est son gendre qui a fait office d’interprète dans ses contacts avec la presse internationale.
Puis, en 1993, une plainte collective a été déposée par une trentaine de victimes devant un tribunal américain. En 2001, la justice américaine a reconnu la compétence de la justice équatorienne pour instruire le dossier.
L’enquête a démontré que Texaco considérait les zones d’exploitation comme inhabitées et déversait tous ses déchets à ciel ouvert (comme si c’était une excuse). Devant leur accumulation, la compagnie a décidé de les utiliser pour recouvrir les routes empruntées par ses camions, aggravant encore la dispersion de produits toxiques dans l’environnement.
Bien entendu, Chevron a contesté le jugement, estimant qu’il était « un autre exemple flagrant du biais politique de la corruption de la justice équatorienne qui plombe le dossier ».
Vous avez bien lu, c’est Chevron qui accuse les juges qui lui sont défavorables de corruption à son détriment. Ironique comme ceux qui disposent de profits colossaux et sont prêts à tous les coups tordus pour en amasser encore plus sont prompts à accuser de corruption ceux dont ils empoisonnent et détruisent les richesses naturelles.
Devant le refus de Chevron de payer l’amende et la contre-attaque du groupe pétrolier qui a déposé plainte pour diffamation contre tous les plaignants équatoriens et qui a engagé un recours devant le tribunal international de La Haye, le gouvernement équatorien envisage de confisquer purement et simplement toutes les installations et stations-essence de Chevron sur son territoire. Les avocats équatoriens ont également lancé un appel à tous les pays où Chevron a des activités à porter plainte à leur tour.
Photos :
1 – L’avocat des plaignants, Pablo Fajardo à gauche (R Buendia/AFP)
2 – Maria Aguinda, l’Indienne quechua qui a fait plier Chevron (source web)
Bravo aux juges et au gouvernement équatoriens qui ont le courage de tenir tête au groupe pétrolier et qui appliquent le principe : pollueurs = payeurs. Une bonne nouvelle pour l’environnement, preuve qu’une prise de conscience traverse l’humanité. Quel superbe espoir !!!
Oui, quel espoir magnifique ! Même si Chevron finit par se défiler et évite de payer l’amende, le message restera tout aussi fort : les pollueurs dehors ! Car au moins une chose est sûre : ils ne pourront plus revenir dans ce pays.
Et il faut espérer que d’autres États dans des situations analogues sauront s’inspirer de l’exemple de l’Équateur pour mener le même type d’action et les virer à jamais de la forêt amazonienne, voire d’autres régions du globe.