Le quotidien en ligne Rue89 a publié hier un article remarquable qui va faire date. Sous la signature d’Actias, il énumère 19 raisons régulièrement invoquées par les partisans de la corrida pour la défendre et explique, une par une, en quoi elles ne tiennent pas la route d’un point de vue purement rationnel ou éthique.
Notre blog étant très actif pour demander l’abolition des corridas, nous reproduisons ci-dessous de larges extraits de cet article et renvoyons nos lecteurs vers le texte intégral sur le site de Rue89.
1/ Le taureau ne souffre pas et « ce n’est qu’un animal »
Certains croient encore que le taureau, comme les végétaux, serait dépourvu de système nerveux. L’éthologie a depuis longtemps intégré le fait que l’immense majorité des mammifères souffrent aux niveaux physiologique (dommages physiques), neurologique (douleurs) et psychologique (stress).
2/ Les abolitionnistes feraient mieux de se préoccuper de l’abattage halal
Tout d’abord, le rapport n’est pas évident, il est question de la corrida, pas de l’abattage halal ou de la faim dans le monde. Dans leur immense majorité, les abolitionnistes ne s’embarrassent pas de considérations irrationnelles, qu’elles soient religieuses ou traditionnelles, et seront évidemment contre les anachronismes monstrueux de l’abattage casher, halal et autres superstitions sanglantes.
Cet argument est non seulement biaisé mais souvent malhonnête.
3/ Les abolitionnistes feraient mieux de se préoccuper de la faim dans le monde
Que faut-il comprendre ? Que le fait que des humains meurent de faim autorise à torturer des animaux ? Si l’on trouve un certain charme à cet argument, il faut avoir l’honnêteté de l’appliquer aussi aux aficionados : plutôt que de gaspiller des sommes folles à torturer un animal, les aficionados et les toreros feraient mieux de se préoccuper de ceux qui meurent de faim.
4/ Respecter les animaux, c’est abaisser les humains
Pourquoi les deux seraient-ils interconnectés comme des vases communicants ? A-t-on une dose limite de respect à partager ?
Beaucoup de philosophes (Plutarque, Montaigne, Yourcenar, Tolstoï …) avancent la thèse inverse : le mépris et la maltraitance animale participent à la normalisation du mépris et de la violence tout court.
Il n’est d’ailleurs pas question de mettre humains et animaux sur un pied d’égalité, ce n’est pas le débat. Il n’est donc pas demandé que le taureau soit traité comme un homme, mais que les hommes arrêtent de traiter le taureau comme un jouet.
5/ La corrida, c’est légal
…comme la pollution, les privilèges des anciens ministres, les discothèques en plein air, la peine de mort aux États-Unis, la lapidation en Iran, le quasi esclavagisme en Chine, la déforestation par napalm et comme le furent en leur temps les sacrifices humains et autres joyeusetés.
Dans un débat éthique, celui qui se réfugie derrière la loi a souvent mauvaise conscience.
Par ailleurs, la même loi considère que si la corrida est pratiquée dans les régions non autorisées, alors il s’agit de « sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux ».
6/ Ceux qui condamnent la corrida n’y connaissent rien
D’abord non, beaucoup d’abolitionnistes finissent par s’y connaitre bien plus que l’aficionado moyen et puis il n’y a pas besoin de connaitre dans le détail une pratique pour la condamner dans sa globalité.
Pas besoin de connaître le fonctionnement d’une centrale nucléaire dans le détail pour s’y opposer sur la base d’arguments simples.
7/ Les aficionados aiment les taureaux et sont des gens comme tout le monde
Le fait d’aimer ou d’être respectable ne donne pas le droit de torturer et surtout, les aficionados ne sont pas le problème. Peu importe qu’ils aiment ou haïssent le taureau, qu’ils soient des psychopathes, des saints ou M. Toutlemonde. Ce qui est en cause, c’est la torture publique d’un animal. Pas l’« amour », l’émerveillement, l’idiotie ou l’indifférence à la souffrance des spectateurs.
8/ La corrida est un art et une tradition
Les jeux du cirque romains et les sacrifices aztèques étaient également des traditions. On peut tout à fait être sensible aujourd’hui encore à l’esthétique et aux codes de ces traditions sans pour autant les cautionner moralement.
Très souvent d’ailleurs, les pires atrocités sont commises dans les plus beaux habits (uniformes des armées soviétique ou nazie, costumes des cérémonies sacrificielles ou des banquiers de Goldman Sachs).
Par conséquent, dans un débat éthique, l’argument de la tradition (« on l’a toujours fait donc c’est bien ») ou de l’art (« c’est beau donc c’est bien ») est complètement inapproprié, il peut permettre de comprendre une situation mais en aucun cas la justifier.
9/ Si l’on n’aime pas ce spectacle, il n’y a qu’à ne pas y aller
Le problème n’est pas d’aimer ou de ne pas aimer un spectacle, le problème ce sont ses conséquences (torturer un animal).
Si les premiers anti-esclavagistes s’étaient contentés de respecter l’« opinion » des esclavagistes en n’ayant pas d’esclaves et en n’achetant que des objets certifiés sans servitude, il aurait fallu un siècle de plus pour abolir cette pratique.
Ce nouvel argument est nul lui aussi, le problème n’est pas d’être spectateur de l’action, le problème c’est l’action.
10/ Les abolitionnistes veulent imposer leur point de vue hygiéniste et moraliste
Certes, mais si c’est le bon ? Heureusement que les anti-esclavagistes réussirent en leur temps à « imposer » leur « point de vue moraliste ».
C’est un argument classique qui consiste à coller une étiquette sur son adversaire…
11/ Vouloir abolir les corridas, c’est de l’anthropomorphisme
Cette accusation est une version sophistiquée de l’argument niant aux taureaux la souffrance en collant aux abolitionnistes une étiquette grandiloquente, mais qui ne change rien à la situation.
Accusation d’intellectuels urbains d’ailleurs, qui oublient souvent que les aficionados, pour défendre leur spectacle, sont les premiers à prêter au taureau des valeurs de courage, de bravoure et de comportement humain.
12/ Il faut du courage pour affronter un taureau
C’est vrai, on peut reconnaitre du courage au torero qui, contre rétribution sonnante et trébuchante, prend un peu de risque.
Quand bien même, il faut beaucoup plus de courage pour se lancer seul dans le trafic d’héroïne, se battre contre les concurrents et échapper à la police… Est-ce pour autant que vendre de l’héroïne est un acte glorieux ?
Le fait qu’un acte soit courageux n’est pas une mesure éthique de cet acte.
Durant une corrida, si le taureau a le malheur de prendre le dessus ou d’oser s’échapper, une armée de tortionnaires se charge immédiatement de lui rappeler son destin de sacrifié. La corrida n’est pas un combat, c’est une mise à mort.
13/ Picasso et Hemingway aimaient bien la corrida
Ces derniers sont beaucoup plus connus pour être des pointures dans leur domaine respectif (la peinture et la littérature) que pour la profondeur de leurs réflexions. Hemingway s’extasiait devant le spectacle d’un cheval paniqué galopant dans ses entrailles pendantes…
La liste des philosophes et artistes ayant pris position en faveur d’un traitement éthique des animaux en général (Léonard De Vinci, Einstein, Tolstoï, Lamartine, Plutarque, Gandhi …) et contre la corrida en particulier (Hugo, Zola, Yourcenar, Théodore Monod, Mark Twain, Georges Clemenceau…) est plus longue et plus impressionnante que les quelques personnalités qui la soutiendront.
S’il suffisait donc de faire un concours de notoriété entre les personnalités « pour » et « contre », la corrida n’aurait jamais existé.
Et s’il suffisait de faire une enquête de popularité, la corrida disparaitrait également (aussi bien en France qu’en Espagne).
14/ Le taureau de combat à une meilleure vie et une mort digne comparé à un animal d’élevage, et les antis n’ont qu’à être végétariens
A moins peut-être de tomber entre les mains d’une armée de vampires psychopathes nazis, peu de choses sauraient être pire que la vie d’un animal d’élevage industriel.
Mais encore une fois, pourquoi lier les deux problèmes ? Les humains ne sauraient ils pas réserver d’autres destins aux animaux à leur merci que la souffrance et la mort ?
Il existe bien des façons de continuer à manger des animaux sans soutenir l’élevage industriel, et c’est souvent le cas des abolitionnistes quand ils ne sont pas végétariens.
Le raisonnement est le même pour l’essence : on peut critiquer l’utilisation du pétrole et militer pour les énergies alternatives, sans pour autant se déplacer à pied ou à vélo. On peut continuer à utiliser sa voiture raisonnablement (à défaut de mieux).
Si vous bénéficiez des conséquences d’une action mauvaise, vous n’êtes pas tenu de soutenir une autre mauvaise action qui n’a rien à voir… Heureusement, sinon nous finirions tous satanistes.
15/ S’opposer à la corrida c’est de la sensiblerie
Beaucoup de victoires humanistes ont été obtenues grâce à la sensibilité (refus de l’esclavagisme, loi contre la maltraitance des animaux…) La sensibilité est à la base de l’empathie, elle-même à la base de l’éthique. Ce n’est probablement pas une mauvaise chose en soi.
La sensiblerie alors ? Ce serait un excès de sensibilité qui obscurcirait le jugement. Encore une fois, il ne suffit pas de coller une étiquette, il faut développer. Tout le monde tombe d’accord sur le fait que ce n’est pas bien de disséquer vivant un chien ou un chat pour la beauté du spectacle. Pourquoi donc réserver l’accusation de sensiblerie aux abolitionnistes ?
16/ L’interdiction de la corrida participe à la destruction de l’identité des peuples
Qu’il y ait un mouvement d’uniformisation culturelle ne signifie pas qu’il faille systématiquement prendre la défense des cultures et des traditions. Par conséquent, on en revient à l’argument de la tradition… qui n’en est pas un, on l’a vu (voir point 8, plus haut).
17/ Les taureaux survivent grâce à la corrida et leur élevage nécessite de grands espaces protégés
Les toros bravo sont en effet une race artificielle, comme les pitbulls, maintenue en vie pour le bon plaisir des aficionados. La couteuse passion de ces derniers n’a pas que des aspects négatifs : pour élever les taureaux, il faut de grands espaces quasi sauvages.
Toutefois, il s’agit d’une « externalité positive », qui n’est pas voulue pour elle-même (grands espaces sauvages préservés) mais pour sa raison d’être (permettre de torturer un animal en public).
Concernant la survie « du » taureau, encore une fois, ce qui est en cause c’est la torture publique, pas la survie d’une espèce artificielle.
De toute façon, ne doutons pas que si la corrida venait à être interdite, les aficionados n’hésiteraient pas à soutenir de petits élevages pour préserver l’espèce, par amour du taureau, n’est ce pas ?
18/ La corrida ne représente rien par rapport à l’élevage concentrationnaire ou l’expérimentation animale
C’est vrai, je crois qu’il y a autour de 4 000 taureaux sacrifiés par an, si l’on compare aux milliards d’animaux abandonnés à leur souffrance dans des camps ou aux millions d’autres torturés en passant des tests aux résultats connus d’avance pour pouvoir remettre sur le marché des cosmétiques inutiles, ça donne le vertige.
C’est un argument valable d’un point de vue utilitariste. La lutte contre la corrida s’inscrit plus dans une démarche symbolique : la remise en cause de la domination totalitaire de l’homme sur les autres espèces, en l’occurrence la souffrance et la vie d’un animal conscient offert pour une distraction de quelques humains.
La véritable force est d’être juste et compatissant avec le plus faible, pas de l’utiliser pour son bon plaisir, c’est la base de l’éthique.
19/ Abolir la corrida c’est nier la nature humaine / la corrida c’est la civilisation / la symbolique du combat de l’homme contre la nature
Le béton et le désert remplacent les derniers hectares habitables de la planète, les humains s’entassent dans des villes termitières complètement coupés du reste de la nature, partageant une culture de plus en plus uniforme, abrutis de téléréalité, cachant la violence intrinsèque de leur mode de vie derrière la publicité et les grands discours…
Une dernière poche de fiers résistants sait encore ce qu’est un animal, ils savent encore que la nature magnifique et sauvage ne fait pas de sentiments.
Afin de préserver ce savoir issu de l’aube de l’humanité, pour lutter contre l’urbanisation des esprits et célébrer la vraie civilisation, ils décident courageusement et en dignes héritiers de rites immémoriaux… de digérer leur repas dominical bien protégés derrière des barrières de sécurité en regardant un animal se faire torturer.
On peut être d’accord sur le constat, mais il y a toujours quelque chose qui cloche sur la conclusion. La corrida est avant tout un spectacle destiné aux urbains en mal de distraction, pas aux rares humains qui sont encore directement en contact avec la nature. Elle est (comme les jeux du cirque) bien plus un ancêtre de la téléréalité qu’une symbolique de la vie et autres grandioses désignations.
Source : Le top 19 des mauvaises raisons de défendre la corrida (Rue89)
Magnifique article qui commence a bien circuler sur le net. Par ailleurs, pour celles et ceux qui liraient encore « Libération » sachez qu’il y a toujours la page tauromachie tenue par Jacques Durand bien mise en avant avec des considérations incroyablement méprisantes pour les personnes qui sont contre cet acte de torture (encore dans deux articles cette semaine au moins). Vous comprendrez que je ne fais pas circuler ces inepties.
anti, de plus en plus anti !
Les arguments injurieux de Jacques Durand (je viens d’y jeter un coup d’oeil) sont, en effet, d’une ineptie parfaite et trouvent leur réponse, posée et respectueuse (mais oui, c’est possible de se parler normalement quand on veut vraiment se parler), dans l’article de Rue89 largement cité ci-dessus.
Il parle en particulier de la « complexité » de cette pratique qu’aucun anti-corrida ne peut comprendre, bien sûr. Qu’y a-t-il de complexe dans « On torture un taureau jusqu’à sa mort et ça fait un beau spectacle » ? C’est décrit dans tous les livres de psychanalyse, ça s’appelle une perversion sadique. Rien de complexe là-dedans, que de la tristesse et du dégoût.
Tout démonter point par point et faire circuler, voilà une très bonne argumentation.
Ainsi l’on peut rétorquer dans le détail de façon précise et simple à ce genre de phrases toutes faites et imposées dans la non réflexion par les pro-corrida.
http://www.dailymotion.com/video/xbhdvt_patrick-font-rien-a-cirer-la-corrid_fun
J’en pleure ! Morte de rire !!! Et pourtant, le sujet n’est pas drôle.
anti
Pitoyable réflexion… Vous osez parler d’ intelligence!
On pourrai trouver 19 très bonne raison d’ être pro corrida.
Svp occupez vous des sujets qui vous concerne!
Peut-être nous sentons-nous concerné par le sujet du respect de la vie animale Clément, ne vous en déplaise. En tous les cas, je prends bonne note de votre manière d’être : volonté de maîtriser les choses sur lesquelles il n’a pas de prise, colérique, autoritaire, difficultés dans la maîtrise de la langue comme dans celle de sa vie probablement.
anti
« Pitoyable réflexion… Vous osez parler d’intelligence!
Bravo Anti ! Bien »mouché » Il n’y a pas qu’une sorte « intelligence ». Apparemment celle du coeur fait défaut à certains !
Belle réponse Anti ; peut-être qu’elle amènera ce monsieur à certaines réflexions, non seulement sur le sujet mais sur lui-même !!!
« Svp occupez-vous des sujets qui vous concerne »
Vous ne croyez-pas si bien dire ! Justement ce sujet nous concerne, puisqu’il est financé par les contribuables que nous sommes ! Hélas cette IGNOMINIE est sous perfusion chronique grâce à l’argent public, alors qu ‘ elle n’intéresse plus personne. Elle disparaîtra à plus ou moins long terme, c’est dans l’ordre des choses !
A propos, voici une information très intéressante : « Nîmes Corrida : Governatori dépose plainte » (merci Sylvana pour le relai) Midi Libre – PH. B. 26/08/2011.
http://www.midilibre.fr/2011/08/25/corrida-governatori-depose-plainte,377146.php
Jean-Marc Governatori, président national du parti Alliance écologiste, qui revendique 4 % des voix aux dernières cantonales et aux élections européennes de 2009, a fait étape, hier en fin d’après-midi à Nîmes, pour son premier tour de France de candidat à l’élection présidentielle de 2012. Un parti qui « représente le courant écologique indépendant, ni à droite, ni à gauche », a-t-il rappelé aux membres de son comité de soutien gardois, animé par Béatrice Rapi, de Lunel, agricultrice bio à la retraite.
Jean-Marc Governatori, qui était déjà partant pour l’élection présidentielle de 2007 mais n’avait pas pu obtenir les 500 signatures permettant de valider sa candidature, a annoncé, hier, qu’il doit porter plainte, aujourd’hui même, contre les organisateurs de la feria de Pentecôte pour avoir laissé des enfants assister à des corridas. « C’est rigoureusement interdit en vertu des articles 227-24, 227-21 et de l’ordonnance 59-28 », a-t-il expliqué. Il a aussi annoncé qu’il allait écrire au préfet du Gard pour lui demander de prendre des mesures en vue de faire respecter cette interdiction. « S’il ne se passe rien dans les deux mois, nous saisirons le tribunal administratif pour contraindre le préfet à agir », annonce l’entourage de Jean-Marc Governatori qui connaît bien Nîmes puisqu’il y a déjà participé à des manifestations anticorrida.
Il y avait d’ailleurs à côté de lui, hier, Thierry Helly (Fédération des luttes pour l’abolition des corridas) ainsi que Zarah Whites, ex-actrice de charme et nouvelle secrétaire nationale d’Alliance écologiste, particulièrement impliquée dans la défense de la cause animale.
anti, « MERCI !!! »
HA ! Enfin un peu de raison !!! Cette histoire de gamins assistant à des corridas était à gerber, bravo à Jean-Marc Governatori de rappeler la loi et, ce qui n’est pas toujours le cas, le simple bon sens !
Et honte aux organisateurs de la feria pour leur perversité et leur cynisme effarants !
A voir absolument :
http://www.dailymotion.com/video/xdo48y_deputes-et-veterinaires-pour-l-abol_animals#from=embed
une vidéo incontournable que j’ai mise aussi dans la note « Les vétérinaires pour l’abolition de la corrida »
http://www.annagaloreleblog.com/archive/2011/09/03/les-veterinaires-pour-l-abolition-de-la-corrida.html
anti