Lost fingers et jazz manouche

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Découverte de hier trop top de la balle qui va en ravir plus d’une ici (suivez mon regard…), j’ai nommé « The Lost Fingers« .

Amis fans de Jazz manouche, le style révélé par Django Reinhardt et Stéphane Grappelli, et fans des années 80, fans jusqu’au bout des seins, vous allez adorer ce groupe de jeunes gens originaires de Québec qui reprend les tubes de nos chères vertes années version jazz manouche.

Trois adorateurs de Django, qui ont baptisé leur groupe en référence aux deux doigts que le roi du swing tzigane a perdus dans l’incendie de sa roulotte à l’âge de 20 ans. Une tragédie qui n’a pas empêché Reinhardt de devenir, avec ses doigts restants, l’un des plus influents guitaristes de toute l’histoire du jazz et une icône que les tziganes vont aduler chaque année jusque sur sa tombe de Samois-sur-Seine.

849447645.jpg Avec The Lost Fingers, on est donc en terrain connu. En fait, on n’est pas perdus du tout. Quand la pompe à deux temps propre au rythme manouche s’emballe et entraîne dans son sillage la guitare Selmer dans de frénétiques solos chromatiques, l’univers tout entier de Django envahit nos tympans. Puis, tout à coup, un vague sentiment de déjà-entendu nous titille l’oreille. Notre mémoire auditive se trouve soudainement en proie à un puissant trouble de la personnalité musicale.

C’est que les trois jazzmen des Lost Fingers se sont coincé les doigts dans des succès des années 80, pour leur plus grand bonheur et le nôtre. Entre deux volées d’arpèges diminués s’impriment sur leur manouche festif les mélodies de Billie Jean (Michael Jackson), de Tainted Love (Soft Cell), de Touch Me (Samantha Fox), ou même de Pumping Up The Jam (Technotronic)! D’où cette vague impression de connaître sans connaître.

Leurs parodies sont à ce point bien ficelées qu’on en oublie presque le kitsch fini de la version originale et qu’on bénit ces dieux de la guitare d’avoir tiré du cimetière ces oubliés du palmarès des années 80. Sourire en coin, on laisse l’avalanche de notes débouler dans nos oreilles béates et le rythme gitan nous donner des fourmis dans les jambes.

De la musique plein les doigts

Il y a à peine un an, le trio de cordes qui rallie Christian Roberge, Byron Mikaloff — deux guitaristes classiques formés au Conservatoire de musique de Québec — et le contrebassiste Alex Morrissette (Université Laval) commençait à peine à trimballer son swing manouche dans les bars, les réceptions et les mariages. Un soir, Roberge, le chanteur du groupe, eut soudain la drôle d’idée d’entonner un classique des année 80, pour amuser la foule.

«Byron et moi, nous faisions du jazz manouche ensemble depuis longtemps. On s’est tout à coup amusés à trouver des classiques des années 80. On s’est battus pour choisir les pièces tellement il y avait un grand choix ! Même si le tempo est souvent similaire à la version originale, on a varié les rythmes. Parfois, on a changé carrément l’harmonie», explique Christian Roberge, la voix chaude des Lost Fingers.

Remaniés façon The Lost Fingers, des tubes comme Careless Whisper (George Michael), You Shook Me All Night Long (AC/DC) ou Part Time Lover (Stevie Wonder) deviennent sous leurs doigts des pièces quasi méconnaissables.

Douze mois après leur introduction par effraction dans l’univers chromé des années 80, ces fous du jazz avaient amassé assez de matériel pour produire un disque complet. «Quand ils ont fait Touch Me de Samantha Fox, la salle a trouvé cela tellement drôle! De fil en aiguille, ils ont adapté d’autres chansons. J’ai fait écouter ça à Paul Dupont-Hébert et ça lui a plu tout de suite», explique leur gérant, Richard Samson, réalisateur de leur premier disque et propriétaire de l’Impérial de Québec.

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Tellement plu, en fait, qu’Hébert, propriétaire de l’étiquette Tandem (qui diffuse Pascale Picard, Duo Dubois, Francis Cabrel), a craqué et leur a proposé illico de produire leur premier disque. Comme ça. Les trois musiciens de la région de Québec ont récemment fait un tabac à Montréal en première partie de Pascale Picard au Club Soda, les 18 et 19 avril derniers, avec leur manouche travesti en new wave, en R&B et en rock.

Le lendemain de leur apparition au Club Soda, le site du groupe, hébergé par myspace.com, a reçu quelque 800 visites par jour. Hébert, un proche de René Angélil, leur a proposé d’inclure à leur premier disque au moins une chanson en français tirée des années 80. Le choix s’est arrêté sur Incognito de Céline Dion. Un choix qui se discute, mais bon. La voix jazzée de Roberge, les envolées de guitares et la contrebasse alerte font vite oublier l’insipidité de la version originale. Et on sourit.

«C’est un groupe qui ratisse large et qui rejoint autant les fans de musique manouche que ceux qui ont connu la musique des années 80, avec AC/DC, Jackson et tous les autres. Ça démocratise le jazz manouche», affirme Richard Samson.

Ces émules déjantés de Biréli Lagrène et de Django viennent d’être choisis par le Festival international de jazz de Montréal pour animer le Cabaret 5 à 7 qui se tiendra tous les soirs dans la tente-miroir qui sera dressée sur la nouvelle place des Festivals, angle Jeanne-Mance et Maisonneuve. Ils iront aussi gratter leurs caisses du côté du Festival d’été de Québec les 3 et 4 juillet, et plus tard au Festival international des guitares du monde de l’Abitibi.

669653890.jpg «Notre rêve, ce serait de rencontrer Woody Allen, qui va venir jouer avec son band», rêve tout haut Alex, le cadet du groupe, étudiant en programmation d’ordinateur. Même si les événements se précipitent pour The Lost Fingers, cela n’a pas empêché son collègue Christian Roberge, 32 ans, de terminer ces derniers mois son doctorat en biologie.

Des projets de tournées avec Pascale Picard, qui se prépare à faire le saut en Europe et aux États-Unis cet automne, planent aussi dans l’air. «Pascale a beaucoup aimé jouer avec eux et a lancé l’idée d’une première partie pour sa prochaine tournée», confie Samson. Mais au moment d’aller écouter ces trois drilles faire claquer leurs cordes claires dans l’antre de Dupont-Hébert, boulevard Saint-Laurent, jeudi dernier, rien n’était encore coulé dans le béton. Entre-temps, leur disque atterrira sur les tablettes des disquaires dès le 5 mai.

Joyeuse contorsion musicale, donc, que cette première mouture sur disque des Lost Fingers. Des doigts agiles et moqueurs, évadés dans une décennie musicale qui était presque reléguée aux oubliettes. Parions que Django rira dans sa tombe. (Source Le devoir.com)

Exemple en images : Pumping Up The Jam

Version originale :

Version Jazz :

A écouter sur Deezer : « Lost in the 80’s »

Avis aux amateurs, The Lost Fingers se produisent au Casino de Paris jusqu’au 28 mars.

Plus d’info sur le festival Django Reinhard.

A écouter pour les fans de jazz manouche : Lemmy Constantine et Sanseverano compositeur de la musique du film d’animation de « U ».

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13 Replies to “Lost fingers et jazz manouche”

  1. Anna Galore

    Trop bien !!! Génial, drôle, inventif, bravo !!! Vive les métissages de toutes sortes !!!

    Il me tarde de rentrer à la casa pour entendre ça (je ne mets jamais le son au boulot).

  2. boudufle

    je confirme un régal, en boucle à la maison…homme blanc = 20 métres de CD jazz…combien en cartons ??? mdrrr

  3. Anna Galore

    Ben voilà, on vient d’écouter tous leurs morceaux ou presque et c’est GENIAL !!!

    Petit faible pour AC-DC et Billie Jean, à se faire pipi dessus quand on compare aux versions originales.

  4. boudufle

    ben, au départ, tu as la brosse à dent, puis le caleçon, et ensuite les bouquins, voir un DVD ,,tu sais celui qui explique ce que homme blanc est, arrive les CD , et là tu fais de la place …. mai tu ne sais pas que ça va gonfler ….mdrrrrrrrrrr!!

    tu me suis bien ???

    c’est kif bourrique avec le reste….comme quoi manouche jazz , échanges mutuels….

    mais je suis sérieuse, il a une tonne de CD et vinyl jazz ……………limitte ça te gonfle ….

  5. BloodyMan outch !

    EnoOorme ! « tainted love » génialissime, comme « careless whispers » d’ailleurs ! Tout est bon là-dedans, je m’en va me commander le cd de ce pas chaloupé !
    Grosse pensée pour Paris-Combo qui reste mon groupe chouchou dans ce style et d’ailleurs en attendant le disque de Lost fingers, je vais me réécouter l’album de paris combo dans mon living living living, living roooOooom

    Bloody, à donf dans le litpod

  6. anti

    Aaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhh Bloody, j’t’atendais au tournant ! J’vois bien la Boud de quoi tu parles, j’suis pareille : 2 / 3 trucs à caser mais souvent 😉

    Ah ! Ah ! La Miss ! Mimi Pinson ! La grande époque ! (En fait, j’ignorais tout il y a encore deux secondes…)

    anti

  7. anti

    Ton anecdote me fait penser à une autre de Dolto. Elle suivait une enfant qui dessinait toujours des poules. Au final (pour faire court) elle ne parlait, à travers ses dessins, que des angoisses de sa mère qui râlait tout le temps en regardant par la fenêtre passer les « poules à ton père ». La pauvre enfant prenait les maîtresses pour des galinacées !

    Si tu es inscrite sur Deezer et que tu enregistres les titres dans une playlist tu pourras les écouter sans avoir à cliquer à chaque fois sur le suivant. Plus sympa 😉 La version de « Touch me » m’a sciée aussi ! Faut dire que AC/DC c’est pas mal non plus et les autres aussi ! Argghh !

    anti

  8. ramses

    Profitez-bien de Deezer, le bruit court que la musique en « streaming » sera bientôt « politiquement incorrecte » (protection des auteurs, parait-il…)

    Je ne retrouve pas Django Reinhardt dans l’extrait « Lost Fingers »…

  9. lison

    Je suis heureuse que tu parles de ce groupe , anti. Très très populaire et aimé de tous. Il ne se passe pas une journée sans qu’on ait le plaisir de les entendre à la radio. Quand tu écoutes ça, à 7heures du matin, ça te mets drette sur le piton pour la journée. Vraiment l’interprétation est originale et ils sont bourrés de talent. Que demander de plus!

  10. Anna Galore

    Ramses, la mention de Django est liée au nom et aux influences du groupe, pas à l’un de ses morceaux en particulier. C’est justement toute l’idée: jouer en style jazz manouche des tubes des années 80.

  11. anti

    Coucou Lison ! J’ai bien pensé à toi en la rédigeant cette note figure-toi. Soit tu connaissais et tu allais être contente qu’on en parle. Soit tu ne connaissais pas et tu allais être contente de le découvrir. Lison, pas d’soucis ! Toujours contente !

    anti, pas mieux !

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