N’avez-vous jamais remarqué, lorsque vous marchez dans un endroit familier, comme il suffit parfois d’un simple pas de côté ou d’un regard à peine différent pour découvrir des choses que vous n’aviez jamais vues jusque-là ? Il arrive même qu’en passant une porte, on se retrouve à autre époque…
Tenez, hier, par exemple… Le ciel était maussade, c’était dimanche, on n’allait quand même pas tourner en rond dans la maison jusque soir. Anti a repéré sur le net que se tenait une vente de livres d’occasions près de l’Esplanade, la grande place à côté des arènes. Voilà un prétexte de sortie qui en valait bien un autre.
En longeant les arènes, elle m’a dit : « Tu avais déjà vu les sculptures de taureaux en haut de l’une des arcades ? » Non, jamais. Elles sont pourtant impossibles à louper, jaillissant de la pierre face au Lisita. Leur présence est un présage sinistre puisque les supplices tauromachiques ne sont arrivés dans les arènes que 18 siècles plus tard.
Les stands de livres étaient sans intérêt. Il n’y avait que très peu de vendeurs, leurs livres étaient ordinaires et pire, certains étaient plus ou moins mouillés, ce qui les rendait invendables. Nous avons poursuivi à travers les rues piétonnes, quasiment désertes. La crise n’en était que plus visible, avec la multiplication de vitrines annonçant « Fermeture définitive » ou « En vente ».
Au détour d’un passage sous un porche, nous voici devant un immense hôtel particulier. Il abrite depuis quelques années le musée du Vieux Nîmes – assez pauvrement doté mais dont l’entrée gratuite. D’un côté, une petite salle à la déco criarde rappelait que la toile de serge venant de Nîmes avait était surnommée Denim et que l’ indigo qui la teignait était nommé bleu de Gênes, déformé en bleu d’Gênes, puis en anglais blue jeans.
De l’autre côté, seule réussite à mon avis, on peut admirer une superbe salle à manger reconstituée, telle qu’elle devait exister en ces lieux il y a un siècle ou deux. Au pied d’un grand escalier d’aspect peu soigné trône un billard imposant. Le long des marches puis au premier, quelques grosses armoires ouvragées, quelques bibelots. Fin de la visite.
En ressortant, on a poursuivi en traversant la place aux Herbes et en continuant droit au nord jusqu’au boulevard. Les ruelles se sont enfin animées, grâce à un marché de bric et de broc, en fait un banal vide-grenier.
Nous avons poussé jusque chez Hélène qui habite depuis peu derrière la Poste. Son appartement est encore en plein travaux, ce qui n’est pas pour déplaire à ses minous. Sur le mur de sa façade, une drôle de bestiole d’un autre monde était peinte en pochoir. Encore un pas de côté, vers l’étrange et l’inattendu.
Dans la soirée, des trombes d’eau sont tombées du ciel, avec éclairs et tonnerre. Ce n’était pas une surprise, une enseigne vue en ville quelques heures plus tôt nous l’avait annoncé, au détour d’un regard.
Très belle journée à vous