Le soleil brille, le ciel est d’un bleu profond, l’air frais est vivifiant. Au rez de chaussée, Michel accorde le piano…
Michel, l’accordeur de piano…
L’accordeur de piano, c’est aussi un roman de Daniel Masson que j’ai bien envie de découvrir.
Présentation de l’éditeur
Londres, dans les brumes d’un après-midi d’octobre 1886. Edgar Drake reçoit une étrange requête du ministère de la Guerre. Il doit quitter sa femme et sa paisible vie londonienne pour partir dans la jungle de Birmanie, afin d’accorder un piano Erard très rare. L’instrument appartient au médecin-général Anthony Carroll, un énigmatique officier anglais dont les succès à ramener la paix dans les états Shan sont devenus légendaires, mais dont les méthodes peu orthodoxes ont soulevé la méfiance de ses supérieurs.
Ainsi commence le voyage d’Edgar à travers l’Europe, la mer Rouge, l’Inde , pour atteindre enfin la Birmanie, et les terres les plus reculées des États Shan. Sur le chemin, des soldats, des mystiques, des bandits et des conteurs croisent sa route…
Au début, ses sentiments sont confus : il n’a jamais quitté Londres et ne comprend guère le sens de cette mission. Cependant, petit
à petit, il sent naître une fascination pour ce voyage, et surtout pour l’homme qu’il doit servir : le mythique Anthony Carroll, ce « soldat-
poète » qui préfère la musique aux fusils. Alors, Edgar prend le risque de tout quitter, comme s’il était « une page vierge » en attente
d’une grande histoire.
Toutes mes dernières lettres, me semble-t-il, avaient ceci de commun qu’elles décrivaient quelque chose d’accompli. Il y a plusieurs semaines, je t’ai dit que ce qui m’attristait, c’était l’idée de repartir d’ici avant d’avoir le sentiment d’un aboutissement. Bizarrement, depuis que j’ai quitté Mandalay, j’ai vu plus de choses que je n’aurais cru possible, et j’ai mieux compris ce que je voyais. En même temps, le sentiment d’inachèvement se fait plus aigu. Chaque jour j’attends une forme de réponse, comme un baume, ou de l’eau pour étancher ma soif. Voilà pourquoi j’ai tardé à t’écrire, et la réponse ne vient toujours pas. Donc si je me décide aujourd’hui, c’est parce que vraiment trop de temps a passé. Quand je te reverrai, les événements dont je parle seront dépassés, les impressions défraîchies. D’où peut-être le besoin de mettre des mots sur le papier, même si je risque d’être le seul à les lire.
Je suis assis sous un saule, sur les bords sablonneux de la Salouen. C’est l’un de mes endroits favoris, tranquille, abrité, d’où je peux voir le fleuve et entendre les gens autour de moi. On est à la fin de l’après-midi. Le soleil commence à décliner, le ciel est violet, envahi par les nuages qui annoncent peut-être encore des orages. Les pluies ont commencé depuis quatre jours. Je me souviendrai mieux du moment de leur arrivée que de celui où j’ai quitté Mandalay, car cet instant a marqué un changement radical sur le plateau. Je n’ai jamais rien vu de comparable. Ce que nous appelons pluie en Angleterre n’est que modeste bruine par rapport aux trombes d’eau de la mousson. Le ciel s’ouvre d’un coup et inonde la terre, tout le monde court s’abriter, les chemins se changent en coulées de boue, en rivières, la tornade secoue les arbres, l’eau tombe des feuillages à pleins seaux, rien ne reste sec. Katherine, comme c’est étrange : je pourrais noircir des pages sur ce seul sujet, sur la façon dont tombe la pluie, la taille des gouttes et leur effet sur la peau, son goût, son odeur, son bruit. Oui, rien que le bruit qu’elle fait sur le chaume, les feuilles, le métal, le saule.
Oh, chère âme, comme ce pays est beau ! La forêt a subi un changement incroyable. En quelques jours seulement, les buissons desséchés se sont transformés en une explosion de couleurs. Quand j’ai pris le vapeur de Rangoon à Mandalay, j’ai rencontré des jeunes soldats qui m’ont parlé de Mae Lwin. Sur le moment, je restais asses sceptique, mais je sais maintenant que tout était vrai. Le soleil brille très fort. Des brises fraîches s’élèvent du fleuve. L’air est plein de l’odeur du nectar, de celle des épices qu’on met dans les aliments. Quant aux sons, ah, quels sons inouïs ! Les branches du saule pendent si bas que j’aperçois à peine la rivière. J’entends des rires. Si je pouvais traduire les rires des enfants par les vibrations d’une corde, ou les fixer sur le papier ! Mais la musique est impuissante, comme les mots. (…)
Katherine, comme j’aimerais que tu les entendes, toi aussi. Non, plutôt je voudrais te les rapporter, ne rien oublier. A l’instant, je sens en moi à la fois une tristesse immense et une joie, un désir lancinant, quelque chose qui surgit des tréfonds, une forme d’extase. Je pèse mes mots, c’est vraiment ce que j’éprouve, cela monte en moi, telle l’eau qui sourd d’un puits et mes yeux se remplissent de larmes, comme si j’allais déborder. Je ne sais pas de quoi il s’agit exactement. Mais je n’aurais jamais cru que je pouvais tant recevoir de la pluie qui tombe ou d’enfants qui jouent. (Pages 323-326)
Une adaptation cinématographique de Werner Herzog est prévue pour 2011. A suivre de près…
L’Accordeur de piano de Daniel Mason Pocket, 2004, 406 pages, à commander auprès de votre libraire préféré.
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Photo accordeur Anna Galore
Quel style magnifique ! A suivre, en effet…
Anna, d’accord
C’est marrant que tu parles de rez-de-chaussée.. j’ai toujours considéré cette partie comme le sous-sol.
Avant que la maison ne soit restaurée, c’était effectivement un sous-sol non habitable. Mais depuis les travaux faits au moment de son achat, les pièces du bas forment un vrai rez-de-chaussée (ou rez-de-jardin dans notre cas) puisque les portes qui donnent sur l’extérieur sont toutes au niveau du sol et pas en dessous (porte d’entrée sur le côté, porte de la chaudière à l’arrière de la maison et grande porte vitrée de la chambre de Gwlad qui donne sur la pelouse).
Par contre, les lieux communs (séjour, cuisine, terrasse) sont au premier niveau, auquel on accède par le grand escalier à l’avant, à quand même plus de trois mètres au-dessus du sol, donc pas vraiment un rez-de-chaussée ^^.
Oui mais ça n’a rien à voir avec le niveau du sol mais avec l’accès le plus proche de la rue. Par exemple dans mon immeuble le rez-de-chaussée est au deuxième étage, après des escaliers plus haut que chez vous, mais il y a une entrée secondaire de l’autre côté sur le parc de la résidence… au deuxième sous-sol (qui est habité aussi).
Alors en effet le terme de rez-de-jardin existant, la partie basse est un rez-de-jardin mais pour moi le haut est un rez-de-chaussée. o.O
J’adore xD !
Anna, rez de partout