Quatrième couplet : Le dernier des esprits
Le fantôme approchait d’un pas lent, grave et silencieux. Quand il fût arrivé près de Scrooge, celui-ci fléchit le genou, car cet esprit semblait répandre autour de lui, dans l’air qu’il traversait, une terreur sombre et mystérieuse.
Une longue robe noire l’enveloppait tout entier et cachait sa tête, son visage, sa forme, ne laissant rien voir qu’une de ses mains étendues, sans quoi il eût été très difficile de détacher cette figure des ombres de la nuit, et de la distinguer de l’obscurité complète dont elle était environnée.
Quand Scrooge vint se placer à ses côtés, il reconnut que le spectre était d’une taille élevée et majestueuse, et que sa mystérieuse présence le remplissait d’une crainte solennelle. Mais il n’en sut pas davantage, car l’esprit ne prononçait pas une parole et ne faisait aucun mouvement.
« Suis-je en la présence du spectre de Noël à venir ? » dit Scrooge.
L’esprit ne répondit rien, mais continua de tenir la main tendue en avant.
« Vous allez me montrer les ombres des choses qui ne sont pas arrivées encore et qui arriveront dans la suite des temps, poursuivit Scrooge.N’est-ce pas, esprit ?
La partie supérieure de la robe du fantôme se contracta un instant par le rapprochement de ses plis, comme si le spectre avait incliné la tête. Ce fut la seule réponse qu’il en obtint.
Quoique habitué déjà au commerce des esprits, Scrooge éprouvait une telle frayeur en présence de ce spectre silencieux, que ses jambes tremblaient sous lui et qu’il se sentit à peine la force de se tenir debout, quand il se prépara à le suivre. L’esprit s’arrêta un moment, comme s’il eût remarqué son trouble et qu’il eût voulu lui donner le temps de se remettre.
Mais Scrooge n’en fut que plus agité ; un frisson de terreur vague parcourait tous ses membres, quand il venait à songer que derrière ce sombre linceul, des yeux de fantôme étaient attentivement fixés sur lui, et que, malgré tous ses efforts, il ne pouvait voir qu’une main de spectre et une grande masse noirâtre.
« Esprit de l’avenir ! s’écria-t-il ; je vous redoute plus qu’aucun des spectres que j’aie encore vus ! Mais, parce que je sais que vous vous proposez mon bien, et parce que j’espère vivre de manière à être un tout autre homme que je n’étais, je suis prêt à vous accompagner avec un coeur reconnaissant. Ne me parlerez-vous pas ? »
Point de réponse. La main seule était toujours tendue droit devant eux.
« Guidez-moi ! dit Scrooge, guidez-moi ! La nuit avance rapidement ; c’est un temps précieux pour moi, je le sais. Esprit, guidez-moi. »
Le fantôme s’éloigna de la même manière qu’il était venu. Scrooge le suivit dans l’ombre de sa robe, et il lui sembla que cette ombre le soulevait et l’emportait avec elle.
On ne pourrait pas dire précisément qu’ils entrèrent dans la ville, ce fut plutôt la ville qui sembla surgir autour d’eux et les entourer de son propre mouvement. Toutefois, ils étaient au cœur même de la cité, à la Bourse, parmi les négociants qui allaient deçà et delà en toute hâte, faisant sonner l’argent dans leurs poches, se groupant pour causer affaires, regardant à leurs montres et jouant d’un air pensif avec leurs grandes breloques, etc., comme Scrooge les avait vus si souvent.
L’esprit s’arrêta près d’un petit groupe de ces capitalistes. Scrooge, remarquant la direction de sa main tendue de leur côté, s’approcha pour entendre la conversation.
« Non… disait un grand et gros homme avec un menton monstrueux, je n’en sais pas davantage ; je sais seulement qu’il est mort.
– Quand est-il mort ? demanda un autre.
– La nuit dernière, je crois.
– Comment, et de quoi est-il mort ? dit un troisième personnage en prenant une énorme prise de tabac dans une vaste tabatière. Je croyais qu’il ne mourrait jamais…
– Il n’y a que Dieu qui le sache, reprit le premier avec un bâillement.
– Qu’a-t-il fait de son argent ? demanda un monsieur à la face rubiconde dont le bout du nez était orné d’une excroissance de chair qui pendillait sans cesse comme les caroncules d’un dindon.
– Je n’en sais trop rien, fit l’homme au double menton en bâillant de nouveau. Peut-être l’a-t-il laissé à sa société ; en tout cas, ce n’est pas à moi qu’il l’a laissé : voilà tout ce que je sais. »
Cette plaisanterie fut accueillie par un rire général.
« Il est probable, dit le même interlocuteur, que les chaises ne lui coûteront pas cher à l’église, non plus que les voitures ; car, sur mon âme, je ne connais personne qui soit disposé à aller à son enterrement. Si nous faisions la partie d’y aller sans invitation !
– Cela m’est égal, s’il y a une collation, observa le monsieur à la loupe ; mais je veux être nourri pour la peine.
– Eh bien ! après tout, dit celui qui avait parlé le premier, je vois que je suis encore le plus désintéressé de vous tous, car je n’y allais pas pour qu’on me donnât des gants noirs, je n’en porte pas : ni pour sa collation, je ne goûte jamais ; et pourtant, je m’offre à y aller, si quelqu’un veut venir avec moi. C’est que, voyez-vous, en y réfléchissant, je ne suis pas sûr le moins du monde de n’avoir pas été son plus intime ami, car nous avions l’habitude de nous arrêter pour échanger quelques mots toutes les fois que nous nous rencontrions. Adieu, messieurs ; au revoir ! »
Le groupe se dispersa et alla se mêler à d’autres. Scrooge reconnaissait tous ces personnages : il regarda l’esprit comme pour lui demander l’explication de ce qu’il venait d’entendre.
Le fantôme se glissa dans une rue et montra du doigt deux individus qui s’abordaient. Scrooge écouta encore, croyant trouver là le mot de l’énigme.
Il les reconnaissait également très bien ; c’étaient deux négociants, riches et considérés. Il s’était toujours piqué d’être bien placé dans leur estime, au point de vue des affaires, s’entend, purement et simplement au point de vue des affaires.
« Comment vous portez-vous ? dit l’un.
– Et vous ? répondit l’autre.
– Bien ! fit le premier. Le vieux Gobseck a donc enfin son compte, hein ?
– On me l’a dit… ; il fait froid, n’est-ce pas ?
– Peuh ! Un temps de la saison ! temps de Noël. Vous ne patinez pas, je suppose ?
– Non, non ; j’ai bien autre chose à penser. Bonjour. »
Pas un mot de plus. Telles furent leur rencontre, leur conversation et leur séparation.
Scrooge eut d’abord la pensée de s’étonner que l’esprit attachât une telle importance à des conversations en apparence si triviales ; mais intimement convaincu qu’elles devaient avoir un sens caché, il se mit à considérer, à part lui, quel il pouvait être selon toutes les probabilités. Il était difficile qu’elles se rapportassent à la mort de Jacob, son vieil associé ; du moins, la chose ne paraissait pas vraisemblable, car cette mort appartenait au passé, et le spectre avait pour département l’avenir : il ne voyait non plus personne de ses connaissances à qui il pût les appliquer. Toutefois, ne doutant pas que, quelle que fût celle à qui il convenait d’en faire application, elles ne renfermassent une leçon secrète à son adresse, et pour son bien, il résolut de recueillir avec soin chacune des paroles qu’il entendrait et chacune des choses qu’il verrait, mais surtout d’observer attentivement sa propre image lorsqu’elle lui apparaîtrait, persuadé que la conduite de son futur lui-même lui donnerait la clef de cette énigme et en rendrait la solution facile.
Il se chercha donc en ce lieu ; mais un autre occupait sa place accoutumée, dans le coin qu’il affectionnait particulièrement, et, quoique l’horloge indiquât l’heure où il venait d’ordinaire à la Bourse, il ne vit personne qui lui ressemblât, parmi cette multitude qui se pressait sous le porche pour y entrer. Cela le surprit peu, néanmoins, car depuis ses premières visions, il avait médité dans son esprit un changement de vie ; il pensait, il espérait que son absence était une preuve qu’il avait mis ses nouvelles résolutions en pratique.
Le fantôme se tenait à ses côtés, immobile, sombre, toujours le bras tendu. Quand Scrooge sortit de sa rêverie, il s’imagina, au mouvement de la main et d’après la position du spectre vis-à-vis de lui, que ses yeux invisibles le regardaient fixement. Cette pensée le fit frissonner de la tête aux pieds.
Quittant le théâtre bruyant des affaires, ils allèrent dans un quartier obscur de la ville, où Scrooge n’avait pas encore pénétré, quoiqu’il en connût parfaitement les êtres et la mauvaise renommée. Les rues étaient sales et étroites, les boutiques et les maisons misérables, les habitants à demi nus, ivres, mal chaussés, hideux. Des allées et des passages sombres, comme autant d’égouts, vomissaient leurs odeurs repoussantes, leurs immondices et leurs ignobles habitants dans ce labyrinthe de rues ; tout le quartier respirait le crime, l’ordure, la misère.
Au fond de ce repaire infâme on voyait une boutique basse, s’avançant en saillie sous le toit d’un auvent, dans laquelle on achetait le fer, les vieux chiffons, les vieilles bouteilles, les os, les restes des assiettes du dîner d’hier au soir. Sur le plancher, à l’intérieur, étaient entassés des clefs rouillées, des clous, des chaînes, des gonds, des limes, des plateaux de balances, des poids et toute espèce de ferraille. Des mystères que peu de personnes eussent été curieuses d’approfondir s’agitaient peut-être sous ces monceaux de guenilles repoussantes, sous ces masses de graisse corrompue et ces sépulcres d’ossements. Assis au milieu des marchandises dont il trafiquait, près d’un réchaud de vieilles briques, un sale coquin, aux cheveux blanchis par l’âge (il avait près de soixante-dix ans), s’abritait contre l’air froid du dehors, au moyen d’un rideau crasseux, composé de lambeaux dépareillés suspendus à une ficelle, et fumait sa pipe en savourant avec délices la volupté de sa paisible solitude.
Scrooge et le fantôme se trouvèrent en présence de cet homme, au moment précis où une femme, chargée d’un lourd paquet, se glissa dans la boutique. A peine y eut-elle mis les pieds, qu’une autre femme, chargée de la même manière, entra pareillement ; cette dernière fut suivie de près par un homme vêtu d’un habit noir râpé, qui ne parut pas moins surpris de la vue des deux femmes qu’elles ne l’avaient été elles-mêmes en se reconnaissant l’une l’autre. Après quelques instants de stupéfaction muette partagée par l’homme à la pipe, ils se mirent à éclater de rire tous les trois.
« Que la femme de journée passe la première ! s’écria celle qui était entrée d’abord. La blanchisseuse viendra après elle, puis, en troisième lieu, l’homme des pompes funèbres. Eh bien ! vieux Joe, dites donc, en voilà un hasard ! Ne dirait-on pas que nous nous sommes donné ici rendez-vous tous les trois ?
– Vous ne pouviez toujours pas mieux choisir la place, dit le vieux Joe, ôtant sa pipe de sa bouche. Entrez au salon. Depuis longtemps vous y avez vos libres entrées, et les deux autres ne sont pas non plus des étrangers. Attendez que j’aie fermé la porte de la boutique. Ah ! comme elle crie ! Je ne crois pas qu’il y ait ici de ferraille plus rouillée que ses gonds, comme il n’y a pas non plus, j’en suis bien sûr, d’os aussi vieux que les miens dans tout mon magasin. Ah ! ah ! nous sommes tous en harmonie avec notre condition, nous sommes bien assortis. Entrez au salon. Entrez. »
Le salon était l’espace séparé de la boutique par le rideau de loques. Le vieux marchand remua le feu avec un barreau brisé provenant d’une rampe d’escalier, et après avoir ravivé sa lampe fumeuse (car il faisait nuit) avec le tuyau de sa pipe, il le remit dans sa bouche.
Pendant qu’il faisait ainsi les honneurs de son hospitalité, la femme qui avait déjà parlé jeta son paquet à terre, et s’assit, dans une pose nonchalante, sur un tabouret, croisant ses coudes sur ses genoux, et lançant aux deux autres comme un défi hardi.
« Eh bien ! quoi ? Qu’y a-t-il donc ? Qu’est-ce qu’il y a, mistress Dilber ? dit-elle. Chacun a bien le droit de songer à soi, je pense. Est-ce qu’il a fait autre chose toute sa vie, lui ?
– C’est vrai, par ma foi ! fit la blanchisseuse. Personne plus que lui.
– Eh bien ! alors, vous n’avez pas besoin de rester là à vous écarquiller les yeux comme si vous aviez peur, bonne femme : les loups ne se mangent pas, je suppose.
– Bien sûr ! dirent en même temps mistress Dilber et le croque-mort. Nous l’espérons bien.
– En ce cas, s’écria la femme, tout est pour le mieux. Il n’y a pas besoin de chercher midi à quatorze heures. Et d’ailleurs, voyez le grand mal. A qui est-ce qu’on fait tort avec ces bagatelles ? Ce n’est pas au mort, je suppose ?
– Ma foi, non, dit Mme Dilber en riant.
– S’il voulait les conserver après sa mort, le vieux grigou, poursuivit la femme, pourquoi n’a-t-il pas fait comme tout le monde ? Il n’avait qu’à prendre une garde pour le veiller quand la mort est venue le frapper, au lieu de rester là à rendre le dernier soupir dans son coin, tout seul comme un chien.
– C’est bien la pure vérité, fit Mme Dilber. Il n’a que ce qu’il mérite.
– Je voudrais bien qu’il n’en fût pas quitte à si bon marché, reprit la femme ; et il en serait autrement, vous pouvez vous en rapporter à moi, si j’avais pu mettre les mains sur quelque autre chose. Ouvrez ce paquet, vieux Joe, et voyons ce que cela vaut. Parlez franchement. Je n’ai pas peur de passer la première ; je ne crains pas qu’ils le voient. Nous savions très bien, je crois, avant de nous rencontrer ici, que nous faisions nos petites affaires. Il n’y a pas de mal à cela. Ouvrez le paquet, Joe. »
Mais il y eut assaut de politesse. Ses amis, par délicatesse, ne voulurent pas le permettre, et l’homme à l’habit noir râpé, montant le premier sur la brèche, produisit son butin. Il n’était pas considérable : un cachet ou deux, un porte-crayon, deux boutons de manche et une épingle de peu de valeur, voilà tout. Chacun de ces objets fut examiné en particulier et prisé par le vieux Joe qui marqua sur le mur avec de la craie les sommes qu’il était disposé à en donner, et additionna le total quand il vit qu’il n’y avait plus d’autre article.
« Voilà votre compte, dit-il, et je ne donnerais pas six pence de plus quand on devrait me faire rôtir à petit feu. Qui vient après ? »
C’était le tour de Mme Dilber. Elle déploya des draps, des serviettes, un habit, deux cuillers à thé en argent, forme antique, une pince à sucre et quelques bottes. Son compte lui fut fait sur le mur de la même manière.
« Je donne toujours trop aux dames. C’est une de mes faiblesses, et c’est ainsi que je me ruine, dit le vieux Joe. Voilà votre compte. Si vous me demandez un penny de plus et que vous marchandiez là-dessus, je pourrais bien me raviser et rabattre un écu sur la générosité de mon premier instinct.
– Et maintenant, Joe, défaites mon paquet », dit la première femme.
Joe se mit à genoux pour plus de facilité, et, après avoir défait une grande quantité de noeuds, il tira du paquet une grosse et lourde pièce d’étoffe sombre.
« Quel nom donnez-vous à cela ? dit-il. Des rideaux de lit ?
– Oui ! répondit la femme en riant et en se penchant sur ses bras croisés. Des rideaux de lit !
– Il n’est pas Dieu possible que vous les ayez enlevés, anneaux et tout, pendant qu’il était encore là sur son lit ? demanda Joe.
– Que si, reprit la femme, et pourquoi pas ?
– Allons, vous étiez née pour faire fortune, dit Joe, et fortune vous ferez.
– Certainement je ne retirerai pas la main quand je pourrai la mettre sur quelque chose, par égard pour un homme pareil, je vous en réponds, Joe, dit la femme avec le plus grand sang-froid. Ne laissez pas tomber de l’huile sur les couvertures, maintenant.
– Ses couvertures, à lui ? demanda Joe.
– Et à qui donc ? répondit la femme. N’avez-vous pas peur qu’il s’enrhume pour n’en pas avoir ?
– Ah çà ! j’espère toujours qu’il n’est pas mort de quelque maladie contagieuse, hein ? dit le vieux Joe s’arrêtant dans son examen et levant la tête.
– N’ayez pas peur, Joe, je n’étais pas tellement folle de sa société, que je fusse restée auprès de lui pour de semblables misères, s’il y avait eu le moindre danger… Oh ! vous pouvez examiner cette chemise jusqu’à ce que les yeux vous en crèvent, vous n’y trouverez pas le plus petit trou ; elle n’est pas même élimée : c’était bien sa meilleure, et de fait elle n’est pas mauvaise. C’est bien heureux que je me sois trouvée là ; sans moi, on l’aurait perdue.
– Qu’appelez-vous perdue ? demanda le vieux Joe.
– On l’aurait enseveli avec, pour sûr, reprit-elle en riant. Croiriez-vous qu’il y avait déjà eu quelqu’un d’assez sot pour le faire ; mais je la lui ai ôtée bien vite. Si le calicot n’est pas assez bon pour cette besogne, je ne vois guère à quoi il peut servir. C’est très bon pour couvrir un corps ; et, quant à l’élégance, le bonhomme ne sera pas plus laid dans une chemise de calicot qu’il ne 1’était avec sa chemise de toile, c’est impossible. »
Scrooge écoutait ce dialogue avec horreur. Tous ces gens-là, assis ou plutôt accroupis autour de leur proie, serrés les uns contre les autres, à la faible lueur de la lampe du vieillard, lui causaient un sentiment de haine et de dégoût aussi prononcé que s’il eût vu d’obscènes démons occupés à marchander le cadavre lui-même.
« Ah ! ah ! continua en riant la même femme lorsque le vieux Joe, tirant un sac de flanelle rempli d’argent, compta à chacun, sur le plancher, la somme qui lui revenait pour sa part. Voilà bien le meilleur, voyez-vous ! Il n’a, de son vivant, effrayé tout le monde, et tenu chacun loin de lui que pour nous assurer des profits après sa mort. Ah ! ah ! ah !
– Esprit ! dit Scrooge frissonnant de la tête aux pieds. Je comprends, je comprends. Le sort de cet infortuné pourrait être le mien. C’est là que mène une vie comme la mienne… Seigneur miséricordieux, qu’est-ce que je vois ? »
Il recula de terreur, car la scène avait changé, et il touchait presque un lit, un lit nu, sans rideaux, sur lequel, recouvert d’un drap déchiré, reposait quelque chose dont le silence même révélait la nature en un terrible langage.
La chambre était très sombre, trop sombre pour qu’on pût remarquer avec exactitude ce qui s’y trouvait, bien que Scrooge obéissant à une impulsion secrète, promenât ses regards curieux, inquiet de savoir ce que c’était que cette chambre. Une pâle lumière, venant du dehors, tombait directement sur le lit où gisait le cadavre de cet homme dépouillé, volé, abandonné de tout le monde, auprès duquel personne ne pleurait, personne ne veillait.
Scrooge jeta les yeux sur le fantôme dont la main fatale lui montrait la tête du mort. Le linceul avait été jeté avec tant de négligence, qu’il aurait suffi du plus léger mouvement de son doigt pour mettre à nu ce visage. Scrooge y songea ; il voyait combien c’était facile, il éprouvait le désir de le faire, mais il n’avait pas plus la force d’écarter ce voile que de renvoyer le spectre qui se tenait debout à ses côtés.
« Oh ! froide, froide, affreuse, épouvantable mort ! Tu peux dresser ici ton autel et l’entourer de toutes les terreurs dont tu disposes ; car tu es bien là dans ton domaine ! Mais, quand c’est une tête aimée, respectée et honorée, tu ne peux faire servir un seul de ses cheveux à tes terribles desseins, ni rendre odieux un de ses traits. Ce n’est pas qu’alors la main ne devienne pesante aussi, et ne retombe si je l’abandonne ; ce n’est pas que le cœur et le pouls ne soient silencieux ; mais cette main, elle fut autrefois ouverte, généreuse, loyale ; ce cœur fut brave, chaud, honnête et tendre : c’était un vrai cœur d’homme qui battait là dans sa poitrine. Frappe, frappe, mort impitoyable ! tes coups sont vains. Tu vas voir jaillir de sa blessure ses bonnes actions, l’honneur de sa vie éphémère, la semence de sa vie immortelle ! »
Aucune voix ne prononça ces paroles aux oreilles de Scrooge, il les entendit cependant lorsqu’il regarda le lit. « Si cet homme pouvait revivre, pensait-il, que dirait-il à présent de ses pensées d’autrefois ? L’avarice, la dureté du cœur, l’âpreté du gain, ces pensées-là, vraiment, 1’ont conduit à une belle fin !
Il est là, gisant dans cette maison déserte et sombre, où il n’y a ni homme, ni femme, ni enfant, qui puisse dire : « Il fut bon pour moi dans telle ou telle circonstance, et je serai bon pour lui, à mon tour, en souvenir d’une parole bienveillante. » Seulement un chat grattait à la porte, et, sous la pierre du foyer, on entendait un bruit de rats qui rongeaient quelque chose. Que venaient-ils chercher dans cette chambre mortuaire ? Pourquoi étaient-ils si avides, si turbulents ? Scrooge n’osa point y penser.
« Esprit, dit-il, ce lieu est affreux. En le quittant, je n’oublierai pas la leçon qu’il me donne, croyez-moi, Partons ! »
Le spectre, de son doigt immobile, lui montrait toujours la tête du cadavre.
« Je vous comprends, répondit Scrooge, et je le ferais si je pouvais. Mais je n’en ai pas la force ; esprit, je n’en ai pas la force. »
Le fantôme parut encore le regarder avec une attention plus marquée.
« S’il y a quelqu’un dans la ville qui ressente une émotion pénible par suite de la mort de cet homme, dit Scrooge en proie aux angoisses de l’agonie, montrez-moi cette personne, esprit, je vous en conjure. »
Le fantôme étendit un moment sa sombre robe devant lui comme une aile, puis, la repliant, lui fit voir une chambre éclairée par la lumière du jour, où se trouvaient une mère et ses enfants.
Elle attendait quelqu’un avec une impatience inquiète ; car elle allait et venait dans sa chambre, tressaillait au moindre bruit, regardait par la fenêtre, jetait les yeux sur la pendule, essayait, mais en vain, de recourir à son aiguille, et pouvait à peine supporter les voix des enfants dans leurs jeux.
Enfin retentit à la porte le coup de marteau si longtemps attendu. Elle courut ouvrir : c’était son mari, homme jeune encore, au visage abattu, flétri par le chagrin ; on y voyait pourtant en ce moment une expression remarquable, une sorte de plaisir triste dont il avait honte et qu’il s’efforçait de réprimer.
Il s’assit pour manger le dîner que sa femme avait tenu chaud près du feu, et quand elle lui demanda d’une voix faible : « Quelles nouvelles ? » (ce qu’elle ne fit qu’après un long silence), il parut embarrassé de répondre.
« Sont-elles bonnes ou mauvaises ? dit-elle pour l’aider.
– Mauvaises, répondit-il.
– Sommes-nous tout à fait ruinés ?
– Non, Caroline. Il y a encore de l’espoir.
– S’il se laisse toucher, dit-elle toute surprise ; après un tel miracle, on pourrait tout espérer, sans doute.
– Il ne peut plus se laisser toucher, dit le mari ; il est mort. »
C’était une créature douce et patiente que cette femme. On le voyait rien qu’à sa figure, et cependant elle ne put s’empêcher de bénir Dieu au fond de son âme à cette annonce imprévue, ni de le dire en joignant les mains. L’instant d’après, elle demanda pardon au ciel, car elle en avait regret ; mais le premier mouvement partait du cœur.
« Ce que cette femme à moitié ivre, dont je vous ai parlé hier soir, m’a dit, quand j’ai essayé de le voir pour obtenir de lui une semaine de délai, et ce que je regardais comme une défaite pour m’éviter est la vérité pure ; non seulement il était déjà fort malade, mais il était mourant.
– A qui sera transférée notre dette ?
– Je l’ignore. Mais avant ce temps, nous aurons la somme, et lors même que nous ne serions pas prêts, ce serait jouer de malheur si nous trouvions dans son successeur un créancier aussi impitoyable. Nous pouvons dormir cette nuit plus tranquilles, Caroline ! »
Oui, malgré eux, leurs cœurs étaient débarrassés d’un poids bien lourd. Les visages des enfants groupés autour d’eux, afin d’écouter une conversation qu’ils comprenaient si peu, étaient plus ouverts et animés d’une joie plus vive ; la mort de cet homme rendait un peu de bonheur à une famille ! La seule émotion causée par cet événement, dont le spectre venait de rendre Scrooge témoin, était une émotion de plaisir.
« Esprit, dit Scrooge, faites-moi voir quelque scène de tendresse étroitement liée avec l’idée de la mort ; sinon cette chambre sombre, que nous avons quittée tout à l’heure, sera toujours présente à mon souvenir. »
Le fantôme le conduisit au travers de plusieurs rues qui lui étaient familières ; à mesure qu’ils marchaient, Scrooge regardait de côté et d’autre dans l’espoir de retrouver son image, mais nulle part il ne pouvait la voir. Ils entrèrent dans la maison du pauvre Bob Cratchit, cette même maison que Scrooge avait visitée précédemment, et trouvèrent la mère et les enfants assis autour du feu.
Ils étaient calmes, très calmes. Les bruyants petits Cratchit se tenaient dans un coin aussi tranquilles que des statues, et demeuraient assis, les yeux fixés sur Pierre, qui avait un livre ouvert devant lui. La mère et ses filles s’occupaient à coudre. Toute la famille était bien tranquille assurément !
« Et il prit un enfant, et il le mit au milieu d’eux. »
Où Scrooge avait-il entendu ces paroles ? Il ne les avait pas rêvées. Il fallait bien que ce fût l’enfant qui les avait lues à haute voix, quand Scrooge et l’esprit franchissaient le seuil de la porte. Pourquoi interrompait-il sa lecture ?
La mère posa son ouvrage sur la table et se couvrit le visage de ses mains.
« La couleur de cette étoffe me fait mal aux yeux, dit-elle.
– La couleur ? Ah ! pauvre Tiny Tim !
– Ils sont mieux maintenant, dit la femme de Cratchit. C’est sans doute de travailler à la lumière qui les fatigue, mais je ne voudrais pour rien au monde laisser voir à votre père, quand il rentrera que mes yeux sont fatigués. Il ne doit pas tarder, c’est bientôt l’heure.
– L’heure est passée, répondit Pierre en fermant le livre. Mais je trouve qu’il va un peu moins vite depuis quelques soirs, ma mère. »
La famille retomba dans son silence et son immobilité. Enfin, la mère reprit d’une voix ferme, dont le ton de gaieté ne faiblit qu’une fois :
« J’ai vu un temps où il allait vite, très vite même, avec… avec Tiny Tim sur son épaule.
– Et moi aussi, s’écria Pierre ; souvent.
– Et moi aussi », s’écria un autre.
Tous répètent : « Et moi aussi.
– Mais Tiny Tim était très léger à porter, reprit la mère en retournant à son ouvrage ; et puis son père l’aimait tant que ce n’était pas pour lui une peine… oh ! non. Mais j’entends votre père à la porte ! »
Elle courut au-devant de lui. Le petit Bob entra avec son cache-nez ; il en avait bien besoin, le pauvre père. Son thé était tout prêt contre le feu, c’était à qui s’empresserait pour le servir. Alors les deux petits Cratchit grimpèrent sur ses genoux, et chacun d’eux posa sa petite joue contre les siennes, comme pour lui dire : « N’y pensez plus, mon père ; ne vous chagrinez pas ! »
Bob fut très gai avec eux, il eut pour tout le monde une bonne parole : il regarda l’ouvrage étalé sur la table et donna des éloges à l’adresse et à l’habileté de Mme Cratchit et de ses filles. « Ce sera fini longtemps avant dimanche, dit-il.
– Dimanche ! Vous y êtes donc allé aujourd’hui, Robert ? demanda sa femme.
– Oui, ma chère, répondit Bob. J’aurais voulu que vous eussiez pu y venir : cela vous aurait fait du bien de voir comme l’emplacement est vert. Mais vous irez le voir souvent. Je lui avais promis que j’irais m’y promener un dimanche… Mon petit, mon petit enfant ! s’écria Bob ! Mon cher petit enfant ! »
Il éclata tout à coup, sans pouvoir s’en empêcher. Pour qu’il pût s’en empêcher, il n’aurait pas fallu qu’il se sentît encore si près de son enfant.
Il quitta la chambre et monta dans celle de l’étage supérieur, joyeusement éclairée et parée de guirlandes comme à Noël. Il y avait une chaise placée tout contre le lit de l’enfant, et l’on voyait à des signes certains que quelqu’un était venu récemment l’occuper. Le pauvre Bob s’y assit à son tour ; et, quand il se fut un peu recueilli, un peu calmé, il déposa un baiser sur ce cher petit visage. Alors il se montra plus résigné à ce cruel événement, et redescendit presque heureux… en apparence.
La famille se rapprocha du feu en causant ; les jeunes filles et leur mère travaillaient toujours. Bob leur parla de la bienveillance extraordinaire que lui avait témoignée le neveu de M. Scrooge, qu’il avait vu une fois à peine, et qui, le rencontrant ce jour-là dans la rue et le voyant un peu… un peu abattu, vous savez, dit Bob, s’était informé avec intérêt de ce qui lui arrivait de fâcheux. Sur quoi, poursuivit Bob, car c’est bien le monsieur le plus affable qu’il soit possible de voir, je lui ai tout raconté. « Je suis sincèrement affligé de ce que vous m’apprenez, monsieur Cratchit, dit-il, pour vous et pour votre excellente femme. » A propos, comment a-t-il pu savoir cela, je l’ignore absolument.
– Savoir quoi, mon ami ?
– Que vous étiez une excellente femme.
– Mais tout le monde ne le sait-il pas ? dit Pierre.
– Très bien répliqué, mon garçon ! s’écria Bob. J’espère que tout le monde le sait. « Sincèrement affligé, disait-il, pour votre excellente femme ; si je puis vous être utile en quelque chose, ajouta-t-il en me remettant sa carte, voici mon adresse. Je vous en prie, venez me voir. » Eh bien ! j’en ai été charmé, non pas tant pour ce qu’il serait en état de faire en notre faveur, que pour ses manières pleines de bienveillance. On aurait dit qu’il avait réellement connu notre Tiny Tim, et qu’il le regrettait comme nous.
– Je suis sûre qu’il a un bon cœur, dit Mme Cratchit.
– Vous en seriez bien plus sûre, ma chère amie, reprit Bob, si vous l’aviez vu et que vous lui eussiez parlé. Je ne serais pas du tout surpris, remarquez ceci, qu’il trouvât une meilleure place à Pierre.
– Entendez-vous, Pierre ? dit Mme Cratchit.
– Et alors, s’écria une des jeunes filles, Pierre se mariera et s’établira pour son compte.
– Allez vous promener, repartit Pierre en faisant une grimace.
– Dame ! cela peut être ou ne pas être, l’un n’est pas plus sûr que l’autre, dit Bob. La chose peut arriver un de ces jours, quoique nous ayons, mon enfant, tout le temps d’y penser. Mais de quelque manière et dans quelque temps que nous nous séparions les uns des autres, je suis sûr que pas un de nous n’oubliera le pauvre Tiny Tim ; n’est-ce pas, nous n’oublierons jamais cette première séparation ?
– Jamais, mon père, s’écrièrent-ils tous ensemble.
– Et je sais, dit Bob, je sais, mes amis, que, quand nous nous rappellerons combien il fut doux et patient, quoique ce ne fût qu’un tout petit, tout petit enfant, nous n’aurons pas de querelles les uns avec les autres, car ce serait oublier le pauvre Tiny Tim.
– Non, jamais, mon père ! répétèrent-ils tous.
– Vous me rendez bien heureux, dit le petit Bob, oui bien heureux ! »
Mme Cratchit l’embrassa, ses filles l’embrassèrent, des deux petits Cratchit l’embrassèrent, Pierre et lui se serrèrent tendrement la main. Ame de Tiny Tim, dans ton essence enfantine, tu étais une émanation de la divinité !
« Spectre, dit Scrooge, quelque chose me dit que l’heure de notre séparation approche. Je le sais, sans savoir comment elle aura lieu. Dites-moi quel était donc cet homme que nous avons vu gisant sur son lit de mort ? »
Le fantôme de Noël futur le transporta, comme auparavant (quoique à une époque différente, pensait-il, car ces dernières visions se brouillaient un peu dans son esprit ; ce qu’il y voyait de plus clair, c’est qu’elles se rapportaient à l’avenir), dans les lieux où se réunissent les gens d’affaires et les négociants, mais sans lui montrer son autre lui-même. A la vérité, l’esprit ne s’arrêta nulle part, mais continua sa course directement, comme pour atteindre plus vite au but, jusqu’à ce que Scrooge le supplia de s’arrêter un instant.
« Cette cour, dit-il, que nous traversons si vite, est depuis longtemps le lieu où j’ai établi le centre de mes occupations. Je reconnais la maison ; laissez-moi voir ce que je serai un jour. »
L’esprit s’arrêta ; sa main désignait un autre point.
« Voici la maison là-bas, s’écria Scrooge. Pourquoi me faites-vous signe d’aller plus loin ? »
L’inexorable doigt ne changeait pas de direction. Scrooge courut à la hâte vers la fenêtre de son comptoir et regarda à l’intérieur. C’était encore un comptoir, mais non plus le sien. L’ameublement n’était pas le même, la personne assise dans le fauteuil n’était pas lui. Le fantôme faisait toujours le geste indicateur.
Scrooge le rejoignit, et, tout en se demandant pourquoi il ne se voyait pas là et ce qu’il pouvait être devenu, il suivit son guide jusqu a une grille de fer. Avant d’entrer, il s’arrêta pour regarder autour de lui.
Un cimetière. Ici, sans doute, gît sous quelques pieds de terre le malheureux dont il allait apprendre le nom. C’était un bien bel endroit, ma foi ! environné de longues murailles, de maisons voisines, envahi par le gazon et les herbes sauvages, plutôt la mort de la végétation que la vie, encombré du trop-plein des sépultures, engraissé jusqu’au dégoût. Oh ! le bel endroit !
L’esprit, debout au milieu des tombeaux, en désigna un. Scrooge s’en approcha en tremblant. Le fantôme était toujours exactement le même, mais Scrooge crut reconnaître dans sa forme solennelle quelque augure nouveau dont il eut peur.
« Avant que je fasse un pas de plus vers cette pierre que vous me montrez, lui dit-il, répondez à cette seule question : Tout ceci, est-ce l’image de ce qui doit être, ou seulement de ce qui peut être ? »
L’esprit, pour toute réponse, abaissa sa main du côté de la tombe près de laquelle il se tenait.
« Quand les hommes s’engagent dans quelques résolutions, elles leur annoncent certain but qui peut être inévitable, s’ils persévèrent dans leur voie. Mais s’ils la quittent, le but change ; en est-il de même des tableaux que vous faites passer sous mes yeux ? »
Et l’esprit demeura immobile comme toujours. Scrooge se traîna vers le tombeau, tremblant de frayeur, et, suivant la direction du doigt, lut sur la pierre d’une sépulture abandonnée son propre nom :
« C’est donc moi qui suis l’homme que j’ai vu gisant sur son lit de mort ? » s’écria-t-il, tombant à genoux.
Le doigt du fantôme se dirigea alternativement de la tombe à lui et de lui à la tombe.
« Non, esprit ! oh ! non, non ! »
Le doigt était toujours là.
« Esprit, s’écria-t-il en se cramponnant à sa robe, écoutez-moi ! je ne suis plus l’homme que j’étais ; je ne serai plus l’homme que j’aurais été si je n’avais pas eu le bonheur de vous connaître. Pourquoi me montrer toutes ces choses, s’il n’y a plus aucun espoir pour moi ? »
Pour la première fois, la main parut faire un mouvement.
« Bon esprit, poursuivit Scrooge toujours prosterné à ses pieds, la face contre terre, vous intercéderez pour moi, vous aurez pitié de moi. Assurez-moi que je puis encore changer ces images que vous m’avez montrées, en changeant de vie ! »
La main s’agita avec un geste bienveillant.
« J’honorerai Noël au fond de mon cœur, et je m’efforcerai d’en conserver le culte toute l’année. Je vivrai dans le passé, le présent et l’avenir ; les trois esprits ne me quitteront plus, car je ne veux pas oublier leurs leçons. Oh ! dites-moi que je puis faire disparaître l’inscription de cette pierre ! »
Dans son angoisse, il saisit la main du spectre. Elle voulut se dégager, mais il la retint par une puissante étreinte. Toutefois, l’esprit, plus fort, encore cette fois, le repoussa.
Levant les mains dans une dernière prière, afin d’obtenir du spectre qu’il changeât sa destinée, Scrooge aperçut une altération dans la robe à capuchon de l’esprit qui diminua de taille, s’affaissa sur lui-même et se transforma en colonne de lit.
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