Il faudra qu’on vous raconte plus en détails notre passage au festival du Tibet, la rencontre émouvante et belle avec Véronique Jannot, la grande pagode et son bouddha géant, les deux yaks et le chameau, les stands à l’ambiance bon enfant, oui, il faudra qu’on vous raconte tout cela, mais un peu plus tard.
Aujourd’hui, je vais juste vous parler de ce que nous avons vu alors que nous étions sur le point de partir pour rejoindre Jean-Gabriel dans une brasserie près du Panthéon. Depuis la scène où différents intervenants avaient parlé dans l’après-midi, suivis par des groupes de musiciens traditionnels hindous, un son énorme nous est parvenu, bourré de synthés, de guitare électrique et de batterie, on ne peut plus moderne. Une petite foule plutôt jeune s’était rassemblée, que nous avons aussitôt rejointe pour écouter un chanteur visiblement très connu puisque tout le monde reprenait ses refrains en chœur.
Il s’appelle Phurbu Namgyal et c’est une superstar dans la communauté tibétaine. Il chante en tibétain, bien sûr. On a mis un petit moment à le réaliser. On a aussi mis un petit moment à nous rendre compte que quasiment tout le monde autour de nous était tibétain. Bon, c’était un peu frustrant quand Phurbu lançait des blagues et qu’on ne comprenait pas un mot mais l’ambiance était géniale et la musique sympa.
A un moment, il s’est arrêté de chanter et nous a dit – en anglais – qu’il allait faire une petite pause pour laisser un autre chanteur venu d’Amsterdam interpréter un morceau. Je n’ai pas réussi à retrouver son nom pour le moment, c’était peut-être un invité-surprise. Lui aussi s’est adressé à la foule en tibétain et il semblait vraiment très drôle parce que les gens étaient morts de rire.
Il fait signe aux mecs de la sono de lancer la bande-son et il se lance dans un rap d’une pêche phénoménale. Il a toutes les mimiques du genre dans son jeu de scène, sauf que les paroles sont dans sa langue. Hé ben on peut vous dire que le rap tibétain, ça envoie. Le seul mot qu’on comprend en fin de refrain, c’est « Tashi delek » (bonjour) et à chaque fois qu’il arrive à ce passage, tout le monde hurle de joie et applaudit.
Heureusement, au bout du troisième couplet, il passe à l’anglais et on comprend enfin les paroles. Là, c’est la grande baffe. Il s’adresse visiblement au Dalaï Lama parce qu’il dit des choses du genre « Tu as dû quitter ton pays il y a longtemps mais depuis, tu t’es toujours battu pour que nous, nous puissions y retourner et tu nous montres la voie pour y parvenir, avec le cœur et dans la paix, alors nous te disons que nous irons un jour tous ensemble là-bas, pour rentrer chez nous et dire à tous Bonjour, nous sommes là ».
Le rap tibétain, c’est comme tous les raps la voix de la rue, de ceux qui se sentent opprimés. Mais chez les Tibétains, le rap parle d’amour et de respect pour celui qui mène leur lutte depuis plus de cinquante ans et de l’aspiration inébranlable de toute une génération qui n’a jamais connu la terre de ses parents de vouloir tout simplement en reprendre la légitime possession pour y vivre.
On lui a fait un triomphe.
Très belle journée à vous