Cette année encore, le pèlerinage gitan des Saintes-Maries a été riche en belles émotions et en rencontres hors du commun. Nous avons beaucoup à vous raconter. Le plus difficile est de choisir par où commencer.
Aujourd’hui, je vais vous parler de Tchavo. Ce n’est pas son vrai nom, ce mot veut dire « garçon » en romanès. Tchavo a 73 ans, une jambe dans le plâtre à cause d’une opération au genou qui le fait souffrir en permanence. Il porte un patronyme rom mais c’est un gadjé, un non-Rom. Il vit dans les Ardennes et appelle sa chaumière une roulotte de pierre. Il est venu s’assoir à notre stand, comme il l’a déjà fait l’an dernier.
Lorsqu’il était jeune, il a passé quatre ans comme élève au fameux cours Simon, du nom de l’acteur français qui l’a créé en 1925 et qui s’est éteint tout près de chez nous, à Uzès, en 1971. Un nombre impressionnant de grands acteurs en est sorti.
Auparavant, il a été éduqué chez les jésuites pendant douze ans. Et puis, un jour, il a pris la route avec sa guitare sous le bras et a commencé une nouvelle vie de nomade. Jusqu’à cette mauvaise chute qu’il fait dans un fossé où des gitans de la famille Lovari le retrouvent, inanimé.
Ils le recueillent, le soignent et pour la première fois de sa vie, l’emmènent aux Saintes-Maries pour le pèlerinage. C’était en 1955. Depuis, il vient tous les ans, cette fois-ci étant la 56e.
Pourtant, en raison de l’état de son genou, cette année, son chirurgien lui avait interdit tout voyage et tout effort, son kiné lui avait précisé qu’il risquait de graves séquelles et son généraliste l’avait prévenu que s’il n’en tenait pas compte, il faudra qu’il change de médecin. Il a pris le premier train qu’il a pu et il est arrivé jusqu’aux Saintes. Ne pas venir lui a été tout simplement inimaginable.
« Il y a un mot que les jésuites ne m’ont jamais appris en douze ans et que j’ai découvert grâce à mes frères roms. Ils m’ont appris le mot liberté. »
Et il ajoute, avant de repartir : « En romanès, il n’y a qu’un seul mot pour dire marcher et voyager. »
Latcho drom, Tchavo.
Très belle journée à vous
Tchavo, ce voyage te portera bonheur 😉
J’adore ce genre d’histoire, des hommes comme on les aime, épris de liberté. Merci pour ta note toute en tendresse.
Merci Valentine !
A ce sujet-là, j’envisage de faire (et de mettre en ligne) une nouvelle édition de mes Carnets de Rencontres en rassemblant les rencontres que je vous ai racontées ici depuis la première édition qui remonte à mai 2010.
Un monsieur qui peut passer du rire aux larmes en un clin d’œil !
A propos de vocabulaire, il est amusant de remarquer que le mot « sara » veut dire marche et mouvement en sanscrit.
Quand Tchavo a dit : « En romanès, il n’y a qu’un seul mot pour dire marcher et voyager. », Anti lui a répondu que chez les Mayas, le mot « partir » n’existait pas. Ils disaient qu’on prend toujours la direction de son foyer.
Il a beaucoup aimé !
« le mot « sara » veut dire marche et mouvement en sanscrit »
Magnifique !
« Quoi que vous puissiez faire, vous prenez toujours la direction de votre foyer » 😉 Prechtel. Saint Chaman oui !
Et en français « Émotion » vient de mise en mouvement 😉 La boucle est bouclée !
anti, prête pour le voyage au pays de Morphée.