2ème courrier Mardi 28 septembre 2010
Résumé de la soirée du vendredi 24 septembre aux « Temps du corps » : travail, extase, souffrance et jouissance du point de vue chamanique.
Ce soir là, une salle pleine à ras bord : beaucoup de diversité à unir. Un temps de tambour préalable à la causerie en même temps qu’un passage de sauge pour chacun le permirent et entraînèrent une qualité d’écoute remarquable. Pendant le cercle de tambours, plus de chants que de coutume se sont aussi fait entendre. La soirée a duré à peu prés 3 heures.
Le Cercle de parole a été tenu par Sigolène, Jean et moi. Il conclut une belle soirée dont je vais résumer la teneur.
Le but de ces moments est de créer des ponts entre les enseignements chamaniques et ceux des psychologies européennes dont la plus riche est la psychanalyse.
Quelles questions se posent les européens au point de vue psychologique : suis-je normal (e) ? Ai-je bien fait de… ? Est-ce que ça va plaire ? Est-ce que je peux… ? Est-ce que je dois faire ceci ou cela ?
Quand la vie est perçue ainsi, l’être humain est coupé de lui-même. Il a cessé de participer à l’engendrement de sa vie pour subir tristement et passivement, masochistement.
Ces questions mettent en évidence l’importance excessive des normes dans l’appréciation qu’un européen moyen porte sur sa vie. Elles révèlent et entretiennent une société anxiogène, nourrissant un état d’insatisfaction chronique, de culpabilité chez presque tous. Un manque de confiance en soi, aussi.
L’homme occidental se vit isolé, marginalisé dans son rapport aux humains : « moi pour qui tout est si difficile ou qui suis si supérieur et les autres qui ne comprennent rien ou pour qui tout est si facile »… La perception de la vie humaine, ici en Europe, est surtout liée aux normes. Elle peut aussi l’être sur d’autre continents quand la perception des normes l’emporte sur celle des liens.
Construits ainsi, les liens au monde sont peu nourriciers. L’humain est coupé du monde devenu décoratif et lieu de performance. Ceci se traduit en phrases ubuesques : « Cette année, j’ai fait (sic !!!) la Thaïlande, l’an prochain je ferai (sic encore…) le Mozambique…» Ces pays existaient bien avant l’arrivée de ce dieu – touriste, non ? Quel rapport l’être de l’humain entretient-il avec le monde naturel, les ancêtres, les descendants en vivant ainsi ?
En revanche, les chamanes issus des sociétés auxquels j’ai eu accès (sibérie, lakota, Mexique (Oaxaca) ) voient davantage l’être humain comme un être de liens avec les ancêtres, les descendants, les végétaux, les minéraux, les animaux auxquels ils doivent respect et dont ils peuvent recevoir des enseignements. Toute société a des normes, mais pour eux, la perception et le respect du lien plus que confronté à des normes édictées par des puissances abstraites (commerciales ou institutionnelles).
Le travail que je propose dans les ateliers comme dans les consultations, appelées LECTURES (voir les courriers précédents) est de remanier nos systèmes psychologique, énergétique, spirituels et physique. Ceci de façon à vivre comme ces chamanes qui se sentent intimement liés à l’univers et de le traduire en actions quotidiennes à travers l’ensemble des liens qui tissent les vies.
Ce travail de découverte de la nature de ses liens doit pouvoir se traduire en rituels permettant de leur donner forme et force. Il vaut toujours mieux vivre joyeusement que de se corriger masochistement ( je ne suis pas assez ou trop…). Eloigner ses yeux de son nombril douloureux pour accomplir ce que l’on a à accomplir pour être un vrai vivant est le but des enseignements chamaniques tels qu’ils se transmettent à travers les âges.
Pour les reconstituer ici, je me sers depuis des années de recherches qui sont identiques dans leur essence à défaut de l’être dans leur forme avec ceux du Mexique ancien ou de la Sibérie.
Un psychologue américain de Harvard définit 8 formes d’intelligence nous reliant au monde personnel et non-personnel. Ces 8 formes de liens sont l’intelligence :
– Naturaliste : liens personnels d’apprentissage et de guérison avec les végétaux, minéraux, animaux
– Spatiale : mise en œuvre par tous dans l’art de vivre, l’architecture, le sport, le dessin,…
– Musicale à travers le plaisir, la création, le partage, les choix d’apprentissage, l’auto-guérison
– Kinesthésique : capacité à déchiffrer les messages des sens, à accomplir des gestes particuliers lors d’activités sportives ou artistiques. Description possible des difficultés et des richesses dans les relations intimes.
– Langagière : formes d’apprentissage, difficultés, utilisation personnelle, créative ou destructive, etc.
– Interpersonnelle : forme spontanée ou erronée de se lier à autrui, de saisir intuitivement un humain différent. Formes de positionnement. Rapport d’utilisation, de service. Résistance à la manipulation.
– Intrapersonnelle ou intrapsychique : connaissance et utilisation de son monde mental et psychique personnel. Capacité d’auto-guérison.
– Logico-mathématique : Terrains d’expérience permettant de formuler des abstractions rendant compte d’apprentissages des liens entre éléments du monde qui nous entoure.
Tout cela est très différent des échelles d’intelligence qui vouent celui qui a 130 à l’ENA ou à l’agrégation, 140 à Polytechnique et/ou au doctorat et 85 au balayage de la cour de l’école, si toutefois on est assez gentil pour lui acheter son balai.
Que peut-on donner au mieux au monde une fois identifiée une forme d’intelligence ? Et comme les chamanes le disent aussi :
« comment protéger ses liens au monde ? » Donc, comment protéger la nature d’une forme particulière de son intelligence, comment la combiner mieux à une autre (exemple de l’ostéopathe qui doit utiliser simultanément intelligence kinesthésique, interpersonnelle et langagière sans compter l’art du diagnostic – intelligence logico-mathématique).
Au cours de cette soirée, j’ai donné quelques exemples permettant de mettre en œuvre l’intelligence naturaliste pour deux personnes et suggéré des rituels pour les renforcer. Puis, à travers quelques exemples liés à la vie de Fools Crow (voir Fools Crow, sagesse et pouvoir de Thomas Mails), établir concrètement la différence entre « pouvoir social » et « pouvoir spirituel ».
Etablir les 4 fonctions principales des chamanes, médecin (du physique, du psychisme), médiateur (rituels, cérémonies, conflits, initiateur), médium (prophète, voyant), méditant (quête de vision, voyage chamanique à la rencontre des alliés animaux, végétaux, etc.)
Cet ensemble d’activités assure aux chamanes une espérance de vie beaucoup plus longue que celle de ceux avec qui ils vivent.
Dans leur ensemble, ces enseignements ont pour but de conduire à des états d’extase et d’éviter la quête de jouissance dans laquelle se perdent les humains ordinaires. L’extase donne la sensation d’une nourriture venant de l’univers et de renaître quand s’établit une CONNAISSANCE (renaître en même temps que l’on apprend et que l’on est renforcé par les formes de vie non-humaines ou ancestrales auxquelles un rituel ou une cérémonie donne accès). L’extase peut relier deux humains quand, dans l’acte d’amour, ils s’ouvrent à l’univers qui vient alors à leur rencontre pour féconder leur être. Cela réclame un état d’esprit particulier…
Les jouissances sont au contraire satisfaction d’un fantasme, d’un besoin de domination d’autrui, de le soumettre à la satisfaction de besoins primaires, d’utilisation de plantes sacrées ou non pour élargir sa conscience sans la relier à autre chose qu’à une simple satisfaction passagère: détendre une tension psychologique. La jouissance a un parfum de mort, n’ouvre à aucun apprentissage.
Au cours de cette soirée, j’ai pu donner des exemples de lectures de tarot distinguant jouissance et extase qui permettaient d’aboutir
à ces évidences.
L’extase est le salaire du chamane. Elle vient seulement au terme d’apprentissages que la tradition des enseignements du Mexique ancien, antérieure à l’arrivée des aztèques, celle de la philosophie de Quetzalcoatl enseignait.
De cette philosophie que je présenterai progressivement avec la collaboration de Muriel Rojas, nous savons beaucoup.
Le culte de la spontanéité est l’ennemi du développement spirituel, de la maturation psychologique. La spontanéité est le meilleur moyen de demeurer infantile. L’apprentissage et la discipline eux permettent de devenir enfantin, de s’élancer joyeusement sans passé ni savoir, plein de fraîcheur d’âme une fois que le rituel a été appris et sérieusement mis en place, que la discipline émotionnelle a été intégrée.
La discipline permet de contrôler ses débordements émotionnels. Elle doit aussi se combiner à la qualité du langage. Une langue personnelle pauvre, mécanique, adolescente ou infantile, entraîne un appauvrissement des liens, une position d’esclave. La combinaison de la fermeté émotionnelle et des intentions, ajoutée à la qualité de l’expression langagière du corps-esprit, assure l’union d’un « visage et d’un cœur », belle expression de la philosophie des temps de Quetzalcoatl. Elle assure que l’humain qui s’y voue tend vers une vie dans laquelle chacun va vers la « qualité de tout ce qu’il peut assimiler ou ce qui lui convient ». Cela tend à éviter de perdre « visage et cœur », de devenir « tordu ».
Ainsi, tout apprentissage doit être ritualisé. A l’entrée dans la Loge de sudation, on s’incline en disant en lakota « o mitakuye oyasin » soit: à tous les êtres de l’univers auxquels je suis relié ( en temps qu’humain ). Cette simple phrase provoque quand on a l’habitude de ce rituel une disponibilité joyeuse à un univers qui se met à vibrer.
Je termine ce bref résumé des propos de vendredi dernier en remerciant un lectrice de tarot de Coyoacan, quartier d’artistes de Mexico. A chacun de ses « clients », elle offrait un court moment, un rituel servant à poser toutes les cartes du tarot en éventail à 1mm l’une de l’autre et à répéter un mantra plusieurs fois.
Intrigué, je décidais de la consulter aussi parce que j’allais à Oaxaca avec un groupe d’une douzaine de français. La ville était en plein état de siège par l’armée avec toutes les barbaries qui étaient en cours.
Son rituel était le suivant : « por mi, por mi casa, por lo que quiero saber », soit : pour moi, pour ma maison, pour ce que je désire savoir. Plus chamaniquement, je propose ceci « pour moi, pour ma maison, pour ce que j’ai besoin d’apprendre du monde et pour tous ceux auxquels je suis relié. »
Le vendredi 29 octobre au « Temps du corps », je parlerai des rituels, de la joie et de la rectitude de sa vie. D’ici là, la Loge, les ateliers et les lectures auront aussi nourri cette réflexion pour nous tous et en particulier pour ceux qui s’y relieront.
Inscriptions à la Loge des 9 et 10 octobre et aux ateliers.
Celui sur les formes d’intelligences démarre le 11 octobre et « nourrir ses liens » le 4 octobre.
Parmi tous ceux qui m’ont dit là ou ailleurs, par mail ou en passant, « je pense venir » mais sans me le confirmer par arrhes ou de haute et vive voix au téléphone (pour ceux que je connais depuis longtemps), qui vient et à quoi ? Ce seront uniquement les inscriptions par téléphone (06 12 26 69 39) qui seront prises en compte car elles seules donnent du corps aux intentions.
Il est très difficile d’organiser un enseignement avec des intentions et une attention spécifique pour chacun dans une telle indécision collective. C’est en un sens contraire à cette quête d’apprentissage. Plus l’engagement est clair, plus chacun bénéficie de l’avoir pris, et plus l’effet bénéfique de la Loge est puissant, plus les enseignements des ateliers sont riches.
Pour le contenu des ateliers, voir les courriers précédents ou le courrier remis aux soirées des « Temps du corps ».
Cordialement.
J.G.Foucaud
anti, relai
Photo 1 : Sauge, photo 2 : publicité pour Southwestern Company, photo 3 : Entrelacs – Logo Éditions du Puits de Roulle – Quand le lien se fait livre, photo 4 : Chamane, dernière photo Terre
Et voilà ! Je viens de relire et d’illustrer la note que je n’avais pas eu le temps de mettre correctement en page samedi (et pour cause !)
Comme de coutume, ce nouveau courrier de Jean-Gabriel est remarquable et particulièrement riche !!!
anti
Je repasse lire tout cela dès que possible, ce que j’ai survolé en diagonale m’a l’air tout à fait passionnant !
« L’extase peut relier deux humains quand, dans l’acte d’amour, ils s’ouvrent à l’univers qui vient alors à leur rencontre pour féconder leur être. »
Tellement vrai, tellement ce que nous ressentons…