Les murs ont la parole : Journal mural Mai 68 Sorbonne Odéon Nanterre etc. de Julien Besançon, éditeur Tchou
Tchou est une maison d’édition dont je lisais pas mal de publications à une époque, spécialisée dans les ouvrages sur l’astrologie, l’ésotérisme, la psychologie, mais aussi la littérature. Son fondateur Claude Tchou est décédé mercredi dernier. Portrait d’un homme, éditeur pas comme les autres.
Décédé mercredi 31 mars à 86 ans, le fondateur du Club du livre du mois et des éditions Tchou était une figure de l’édition de la deuxième moitié du XXe siècle.
Né à Bruxelles d’un père diplomate chinois et d’une mère issue de la grande bourgeoisie belge, l’éditeur Claude Tchou, figure singulière de l’édition de la deuxième moitié du XXe siècle, est décédé mercredi 31 mars, à 86 ans, des suites d’une longue maladie, ont indiqué ses proches.
Claude Tchou, qui fut le mari de la journaliste et ancienne présidente du Conseil supérieur de l’audiovisuel, Michèle Cotta, avec laquelle il eut deux enfants, n’était pas a priori destiné à devenir un éditeur parisien marquant, un personnage parfaitement original, un esthète au parcours professionnel très turbulent.
Après des années d’apprentissage, qui passent par l’édition sur beau papier de poèmes écrits par ses camarades de classe et par l’expérience du métier de représentant dans la banlieue bruxelloise, Claude Tchou s’installe à Paris, la ville dont il a toujours rêvé, pour créer en 1950 le Club du livre du mois, antenne française du club belge l’Ambassade du livre. Il en sera totalement patron de 1951 à 1958.
Des clubs de livres à l’édition traditionnelle
Pendant ces années d’opulence pour les clubs de livre en France – il participe aussi à la création du Grand livre du mois –, il publiera environ 2 000 livres.
Il fondera ensuite le Cercle du livre précieux, où il éditera, entre autre, des œuvres de Jean Paulhan, d’Emile Zola ou de Franz Kafka, et des œuvres érotiques, dont celles de Sade, qui lui vaudront quelques ennuis avec la censure.
Claude Tchou aborde l’édition traditionnelle à partir de 1964, en créant les éditions Tchou, où il privilégie l’astrologie, l’ésotérisme, la psychologie, la littérature.
Les éditions Tchou publient notamment de célèbres collections encore actives aujourd’hui chez Place des Victoires : Les Murs Ont la Parole, publiée en 1968, inclut le premier ouvrage à compiler les citations des étudiants lors des révoltes de mai. Les Guides Noirs (lieux mystérieux, légendes des régions françaises) et Histoires et Légendes demeurent inégalées. Enfin, La Vilaine Lulu, la bande dessinée d’Yves Saint-Laurent, publiée en 1967, est un classique.
Au début des années quatre-vingt, le succès des collections des Grandes découvertes de la Psychanalyse, du Corps à Vivre et des Grands Livres du Zodiaque permirent à la maison de se développer : en 1986, les éditions Sand-Tchou reprirent ainsi les éditions Mengès, dont le fonds comprenait notamment la célèbre collection Vivre (Vivre Venise, Vivre Sienne…). Le projet était de développer des beaux livres d’excellence : aux meilleures photographies et illustrations seraient désormais associées les textes des plus éminents spécialistes.
Ainsi débuta une fantastique collaboration, avec notamment Jean-Marie Pérouse de Montclos, qui a signé à ce jour près d’une dizaine de titres au éditions Mengès. Son Versailles, à l’appui du célèbre reportage de Robert Polidori, demeure une référence mondiale, vingt ans après sa parution.
La marque Place des Victoires fut créée à la fin des années quatre-vingt dix, pour aborder les projets les plus contemporains en architecture et en design, pour publier de beaux livres sur des artistes du monde du spectacle, ou encore des ouvrages d’art pratique. Aujourd’hui, Place des Victoires reprend également le fonds d’art classique des éditions Mengès, et l’équipe éditoriale dédie un savoir-faire de plusieurs décennies à la satisfaction du lecteur.
Mais revenons à Claude Tchou. Pendant plusieurs années il publie pour la vente par correspondance et pour la librairie, et crée parallèlement un département de vente par correspondance chez Robert Laffont.
Sa vie professionnelle est jalonnée de difficultés financières, de dépôts de bilan, de reprise (par le groupe L’Express en 1970), puis de retour vers l’édition et de nouveaux dépôts de bilan.
A partir de 1979, sa maison est reprise par Carl Van Eiszner pour être développée sous le nom des éditions Sand, puis Sand et Tchou.
Claude Tchou revient en 1999 dans l’édition, en créant la Bibliothèque des introuvables, dans laquelle il réédite des textes rares.
Un amoureux du beau livre
Cet amoureux des livres soignés, des beaux papiers et des belles typographies, personnalité tout à fait atypique dans le paysage éditorial, parfois controversée, aura marqué les collaborateurs qui ont travaillé auprès de lui.
Dans sa maison sont passés plusieurs éditeurs de premier plan que l’on retrouvera ensuite à des postes clés, dont Denis Roche, Françoise Perrot, Philippe Schuwer, François Caradec, Jean-Pierre Sicre ou encore Robert Pépin, Pierre Oster et Diane de Selliers.
Une cérémonie religieuse aura lieu mercredi 7 avril à 14h30 à l’église Saint-Germain-des-Prés, à Paris (6e). (Source Livre Hebdo, Place des Victoires)
anti
Bien des souvenirs et des impressions en lisant cette note… Les éditions Tchou étaient mythiques à l’époque où j’entrais dans ma vie d’adulte.
Je me souviens avoir eu le volume des « Murs ont la parole » sur les slogans de 68, quelque part sur mes étagères pendant des années et j’ai feuilleté un ou deux de ses Guides Noirs, ainsi que plusieurs livres portant sur l’ésotérisme.
Et quelle belle idée que cette Bibliothèque des Introuvables… analogue à celle que tu avais, Anti, quand tu commençais à réfléchir à la création de ta maison d’édition.
Eh oui, une idée semblable à celle que j’avais (et garde dans un coin de ma tête) au départ, à la différence des titres édités à la Bibliothèque des introuvables. Dans ce cas, il s’agit plus d’éditions rares de textes célèbres que de textes rares comme ce que j’envisageais de publier.
Vraiment, ce monsieur Tchou a fait des choses bien. Respect.
anti
Les deux guides noirs, « Paris mystérieux » et « la France mystérieuse », que j’avais déniché chez des bouquinistes il y a 20 ans (ils étaient déjà difficiles à trouver) figurent parmi les joyaux de ma bibliothèque… Je les consulte régulièrement.
Coucou,
On peut encore les trouver sur Priceminister. C’est génial ce site, on y déniche de véritables merveilles ! Je vais p’t’être me les offrir un de ces jours.
La photo du livre de Wirth sur le tarot est une spéciale dédicace à Ramses qui m’a fait le grand bonheur de me l’offrir. Merci encore l’ami, je suis certaine que je prendrai beaucoup de plaisir à le lire le moment venu.
anti
J’ai été pendant des années abonné au « Grand Livre du Mois », qui a constitué une bonne partie de ma bibliothèque, sans avoir jamais fait le rapprochement avec les Editions Tchou, bien connues pour leurs ouvrages ésotériques. C’est donc un grand Monsieur qui disparaît et à qui, indirectement, je dois beaucoup.