Ce matin, en prenant mon café je suis tombée sur un documentaire sur l’Inde très sympathique. Aussi, après vous avoir fait visiter Le Temple de Neasden, je vous emmène dans un autre endroit sacré qui m’a beaucoup émue : le Temple des Rats de Karni-Mata, près de Bikâner, avec une pensée spéciale pour notre amie eMma qui s’envole pour ce pays magique dans quelques heures 😉
Bîkâner est une ville située dans le nord de l’Inde dans l’état du Rajasthan. A une trentaine de kilomètres de la ville, on trouve le temple de Karni Mata, dédié à la mystique qui bénit la création de l’état par Rao Bîkâjî.
Le temple est aussi parfois appelé temple des rats car cet animal y est vénéré et prospère en grand nombre dans le temple. En effet, la légende affirme que les âmes des dévots de Karni Mata sont incarnés dans les rats du temple. Il est considéré de bonne augure d’y apercevoir un rat blanc.
Entrée du Temple de Karni-Mata – Photo
Temple de Karni-Mata, détail – Photo
Pour abriter les rongeurs, un temple fut construit autour de la grotte dans laquelle vivait Karni Mata. L’architecture extérieure actuelle du temple fut cependant rajoutée au XIX par le maharaja Ganga Singh : une imposante façade de marbre ouvragée, des sculptures représentant la vie de Karni Mata et une immense porte en argent massif ouvrent sur le sanctuaire.
Et depuis 500 ans, la dévotion à l’égard des rongeurs n’a pas faiblit : des centaines de milliers d’hindous viennent se recueillir dans le temple chaque année.
Le lieu renferme également son lot de miracles : les prêtres de Karni Mata racontent volontiers que le temple fut le seul lieu à être épargné par l’épidémie de peste bubonique qui s’abattit sur l’Inde entière en 1927. Il parait également que la population de rats n’augmente jamais, et que l’on ne voit jamais de ratons : les nouveaux individus surgissant de nulle part et les plus vieux se réincarnant à leur mort.
Temple de Karni-Mata – Photo
Rassurez-vous, le temple ne grouille pas tant que ça : les rats sont pour la plupart paisiblement endormis aux quatre coins du temple, ne se réveillant que pour aller manger dans les grands plats métalliques garnis des offrandes des dévots. Il faut cependant passer outre l’odeur prégnante que dégagent les rongeurs, et faire attention où l’on met les pieds : qui tue un rat doit le remplacer par une statue de rongeur en or pur…
Entrée gratuite, supplément de 20 roupies pour les appareils photo (Source).
Karni-Mata – Photo
La Légende de Karni-Mata
Il est dit qu’à la fin du quatorzième siècle, dans le village de Suwap (près de l’actuelle Jodhpur), vivait un heureux couple, Mehaji et Deval Bai. Mehaji, le mari, était un fidèle dévot de la déesse Durga, qui symbolise la puissance et la victoire dans l’éternel combat du bien contre le mal.
Leurs enfants étaient déjà au nombre de cinq, rien que des filles, lorsque Deval Bai tomba une nouvelle fois enceinte. La nuit précédant son accouchement, la mère rêva d’une divinité descendant sur elle pour lui apprendre qu’elle allait donner naissance à une réincarnation de la déesse Durga. Le lendemain, Deval Bai donna naissance à une sixième fille qui fut appelée Ridhu Bai. La tante de l’enfant, la sœur de Mehaji, entra dans une grande colère quand elle découvrit que son frère n’avait toujours pas de fils. Dans sa rage, elle leva le poing pour frapper le bébé, mais ses doigts restèrent mystérieusement soudés ensemble, déformant sa main sans que personne puisse y remédier.
Quelques années plus tard, alors que la situation financière de la famille s’était beaucoup améliorée, la tante vint leur rendre visite. Elle commença à coiffer Ridhu Bai, qui lui demanda pourquoi elle n’utilisait qu’une seule main. La vieille femme lui expliqua ce qui s’était produit le jour de sa naissance. La fillette prit la main de sa tante dans la sienne et lui dit qu’elle ne voyait rien de particulier : effectivement, la main avait soudain retrouvé son aspect normal. Secouée par ce miracle, et se souvenant du rêve prophétique de Deval Bai qu’elle n’avait pas voulu croire à l’époque, la tante commença à appeler sa nièce Karni Mata, ce qui signifie Celle Qui Fera des Miracles.
Karni Mata sauva la vie de son père alors qu’elle n’avait que six ans, juste en posant ses mains sur le bras qui venait d’être mordu par un serpent. C’est à partir de ce moment que la réputation de Karni Mata commença à se répandre bien plus loin que son village. Le seigneur Rao Sekha en entendit parler et vint la voir avec tous ses soldats pour demander sa bénédiction avant une grande bataille. Karni Mata voulut inviter tout le monde dans la maison de ses parents. Rao Sekha, voyant qu’il n’y avait pas beaucoup de nourriture à disposition, somma tous ses hommes de ne surtout pas se plaindre des rations que la jeune fille leur donnerait. Mais Karni Mata servit du pain et de la sauce à satiété, les sortant des pots qui semblaient ne jamais se vider. Rao Sekha remporta la victoire qu’il avait désirée en ne perdant qu’un unique soldat, le seul qui avait refusé le pain et la sauce de Karni Mata.
(Photo)
Les années passant, les parents de Karni Mata voulurent lui trouver un mari. L’adolescente suggéra elle-même le nom de Depaji, le fils d’un célèbre philosophe habitant le village de Sathika. Le mariage se déroula très vite et très simplement. Tandis que la procession revenait de Sathika vers Suwap, une grande soif s’empara de tous les invités et de leurs animaux. Karni Mata indiqua une dune de sable, derrière laquelle on découvrit un réservoir rempli d’eau. Après avoir abreuvé sa soif, Depaji retourna vers le palanquin qui transportait sa jeune épousée. Lorsqu’il souleva le rideau, il eut l’impression durant quelques secondes de voir une déesse assise à côté d’un lion, mais la vision ne dura pas. On dit aussi que près de là, au village de Kaluja, Karni Mata conseilla un jour aux habitants de s’abstenir de couper les arbres près de leur puits. A partir de cet instant, ledit puits ne manqua jamais d’eau, et il existe encore aujourd’hui sous le nom de Karnisagar.
Karni Mata ne vécut que deux ans à Sathika. Lassée de la suspicion des habitants, elle quitta un jour le village avec toute sa famille et décida qu’elle s’arrêterait là où le coucher de soleil la trouverait. En chemin, elle passa par le village de Jangloo. Rao Kanha, le seigneur du lieu, lui refusa l’accès au puits car il était bien trop bas pour abreuver des étrangers. Passant outre, Karni Mata demanda à ses suivants de se servir, et à la surprise générale le puits donna autant d’eau qu’il en fallait. Au coucher du soleil, elle arriva à la jungle de Deshnok. Mais là encore Rao Kanha n’en fut pas satisfait et envoya deux de ses officiers pour faire évacuer les lieux. Devant le refus de Karni Mata, les deux hommes prononcèrent des paroles insultantes, ce qui leur valut de réapparaître devant leur maître avec des becs de corbeau en lieu et place de leurs bouches. Cette fois-ci, Rao Kanha se rendit sur les lieux avec son armée.
Karni Mata accepta de partir à condition qu’on l’aide à mettre sur son chariot une petite boîte de bois contenant une idole de la déesse Awad Mata. Mais aucun homme ni aucun animal ne put faire bouger l’objet du moindre centimètre. Après cela, Karni Mata fit la remarque que tout ceci était hors de propos puisque Rao Kanha était arrivé à la fin de sa vie. Blessé par ces paroles, le seigneur lui demanda de prédire ce qui allait lui arriver. Karni Mata traça une ligne sur le sol, devant ses pieds, et lui déclara qu’il mourrait dès qu’il l’aurait franchie. Relevant le défi, Rao Kanha fit un pas en avant et s’écroula raide mort. Karni Mata installa donc sa résidence dans la jungle près du village de Deshnok, à un endroit connu sous le nom de Nehjiri. Aujourd’hui encore, on voit dans le temple Temre Rai de Deshnok cette boîte de bois contenant l’idole de Awad Mata.
Les années passèrent, nombreuses, et lorsque Karni Mata eut près de 80 ans, son mari décéda. Elle s’installa alors à Deshnok où elle construisit pierre par pierre, sans aucun liant, une sorte de grotte dans laquelle elle passait le plus clair de son temps pour méditer. Un jour, on lui amena le corps de Laxmanraj, un conteur qui était aussi son gendre et qui venait de se noyer dans un lac voisin. Karni Mata s’enferma avec le corps pendant trois jours, au cours desquels elle affronta Yamraj, l’Esprit de la Mort. Lorsque la porte de la grotte se rouvrit, Laxmanraj en sortit vivant.
De même que plusieurs rats, des animaux dont le nombre augmenta de jour en jour. En effet, Karni Mata avait obtenu de Yamraj le droit de s’occuper des âmes des conteurs, et ceux-ci, au lieu de disparaître dans le royaume des ombres, revenaient sous la forme de « kabas », de rats, qui eux-mêmes ensuite renaissaient comme conteurs.
La fin de la vie de Karni Mata fut encore pleine de miracles. Elle aida Rao Jodha, fondateur de la ville de Jodhpur, ainsi que Rao Bika, le fondateur de Bikaner, et ce fut elle qui posa la première pierre du grand fort de Bikaner. Elle disparut à l’âge de 151 ans, « disparut » au sens propre du terme puisque l’on raconte que son corps se désintégra en un flot de lumière divine le jour où elle le décida.
Aujourd’hui encore, à Deshnok, le temple de Karni Mata est la résidence des kabas, ces rats qui n’ont sont pas. Comment expliquer, en effet, que les animaux ne quittent pas le temple dont les portes sont grandes ouvertes ? Comment expliquer que ces animaux d’ordinaire peureux ne soient pas dérangés par la présence des innombrables pèlerins ? Comment expliquer que l’on ne voit jamais de bébés rats et que la population n’augmente pas, comme s’il n’y avait aucune reproduction, comme si les nouveaux individus surgissaient de nulle part ? Allez donc là-bas, et voyez par vous-mêmes. Et n’oubliez pas que si un kaba vous marche sur les pieds, c’est signe de bonne fortune… (Source 1000 jours 1001 nuits).
D’autres articles sur l’Inde sur le blog.
Les poèmes de Jayshree.
Prenez un avion dans un jardin, rencontrez les rats du temple de Karni Mata, Bull le sauveur des missiles, bref regardez le documentaire « Mon voyage en Inde » sur ARTE +
Bon voyage !
anti
Incroyable pays que je ne me lasse pas de découvrir. Le documentaire sur Arte est génial, merci Anti!
Dans mes livres sur l’Inde, j’en cite encore un que j’adore particulièrement: Bénarès, carnet d’un voyage indien de Sandrine Balleydier et Merlin chez Glénat. C’est un jeune couple, parti sac au dos, qui relate leur périple avec beaucoup d’humour. Un livre d’impressions, très vivant, où l’on sent les odeurs, on entend les bruits assourdissants. Les croquis sont magnifiques.
Et très beau voyage à Emma….
Je n’ai pas pu le regarder en entier ce matin, mais c’est au programme avec Anna 😉
Il y en a des pays et des coutumes fascinants oui ! Ah là là ! Alors, à la liste des souhaits, après des journées de 48 h, je demande une vie pleine de découvertes encore et toujours !
Merci pour les références de livres. La tour de Plaisir va encore prendre quelques centimètres… (la pile de livre quoi ;-))
anti
« Le documentaire sur Arte est génial, merci Anti! »
Alors hier soir, le lien indiquait que la vidéo n’était plus disponible. En revanche, il y a les autres épisodes qui sont tout aussi hilarants. Il faut dire que Paul Merton est excellentissime. Ah ! L’humour anglais ! C’est tellement intéressant cette façon de l’accompagner réellement dans son voyage ! Je crois qu’on va se faire la totalité des 5 documentaires, enfin des 4 qui sont encore visibles sur ARTE +
anti
Edit : je viens de le retrouver sur Youtube en anglais, trop bien : http://www.youtube.com/watch?v=UgL4m1kcol8
Quels souvenirs !! Je me rappelle avoir eu les pieds nus au milieu de tous ces rats !!
A Bikaner, il y a à côté d’un temple, un petit enclos fermé à la façon d’une volière. Dedans il y a de nombreux rats. Animal vénéré qui fait penser à la monture de Ganesha.